Fallait l’oser

je l’apprends tout frais tout neuf : l’abandon du futur super-méga-aéroport du « Grand Ouest ». Le titre ci-dessus résume ma réaction : c’est, paradoxalement, courageux ! courageux d’admettre que les zélus, les zénarques, les zélés bétonneurs ont porté un dossier mal foutu.

Ce n’est pas gagné pour autant, les « pour » vont essayer que cette décision soit invalidée. C’est vrai qu’à Nantes les avions atterrissent en survolant la ville plutôt bas, c’est dérangeant – comme dans tant d’autres endroits sur la planète (*). Saisine en justice, manifs, pétitions… ce n’est pas fini. Mais on est enfin arrivés à une borne : non, le bétonnage n’est pas inéluctable, non les gros-mahousses-rouleaux compresseurs ne sont pas une fatalité.

Les « pour » sont rouges de colère et crient à l’infamie, c’est bien normal : de toutes façons toute décision aurait déclenché des protestations. C’était un projet d’affrontement, un symbole de lutte à mort entre les « aménageurs-bétonneurs » et les agro-anarcho-écologistes. Là ce sont les aménageurs qui rouspètent… sinon ça serait les autres.

J’ai écrit des tas de billets pour expliquer que ce projet était idiot : obsolète, pas pertinent, surcalibré, trop cher, mal foutu. Adios NDDL-sur-tarmac, et au diable les toupies à béton. Ou plutôt nettement plus au Nord, un aéroport bien breton, tiens ! à Rennes par exemple, où les élus ont maintenant une excellente raison d’entreprendre de moderniser et dynamiser, si nécessaire, LEUR aéroport à eux, puisque Nantes-Atlantique, loin-loin au sud de la Loire, ne leur convient pas.

(Au fait : il y a un aéroport peinard de chez Peinard, près d’Angers : ça roupille doucement là-bas… celui-là n’a pas échappé aux bétonneurs, mais les racines de pissenlits poussent pour crever le tarmac).

Tibert

(*) Il est des nuisances non aéroportuaires, sévères, pénibles, qu’on pourrait éradiquer si on en avait la volonté, là-haut : tous ces deux-roues aux pots trafiqués qui divaguent dans les villes, accompagnés de leur épouvantable vacarme. Evidemment, s’attaquer à ce fléau est moins sexy que de déménager un aéroport…

Herbes folles sur le tarmac

Le dossier de Notre-Dame-des-Landes, alias NDDL,  ce vieil aéroport du futur des années 60 projeté pour faire plaisir aux édiles et notables de la Chambre de Commerce locale, engraisser le BTP, bétonner les terres agricoles et accessoirement dégager du ciel nantais les avions en approche-atterrissage, connaît un nouveau rebondissement : le « rapporteur public » de la Cour Administrative d’Appel de Nantes y met une grosse réserve.

Cette affaire est tout simplement lamentable et pour cela passera à la postérité, si l’on veut bien enfin ouvrir les yeux sur les tares de la démocratie et des chemins décisionnels dans notre pays : un paradigme de dossier foireux. D’un côté la Loi bafouée allègrement, des individus barbus, « hirsutes-menaçants » (ce n’est pas de moi, c’est de Louis Aragon, et il ne traitait pas de la ZAD de NDDL) occupant le terrain en toute illégalité, ridiculisant les décisions judiciaires énoncées jusqu’à présent, les coups de menton et les effets de biscottos de notre Premier Ministre ; de l’autre côté des élus et décideurs autistes, sourds et aveugles, portant, butés, un projet des années 60, sûrs de chez Sûr d’avoir raison contre toutes les objections pertinentes qu’on a pu opposer à cette vieille baudruche clairement surdimensionnée et jamais remise à plat.

La grande majorité de ces naufrages mettent en évidence l’incapacité crasse de nos décideurs à tenir compte, sur des dossiers de long terme, du TEMPS QUI PASSE ! en informatique, tenez, les dinosaures logiciels genre Paye des Militaires sont morts-nés dès les balbutiements des premiers bulletins de solde  : on les a définis 5 ans plus tôt, et entretemps la donne technique, les règles du jeu… ont changé ! à la poubelle, Louvois, Chorus et consorts !

Tenez, pour illustrer, un peu d’humour dans ce monde sinistre, je me fais un plaisir de vous citer un extrait du « courrier des lecteurs » là-dessus, à la suite de l’article que le Monde y consacre :

« La piste (*) est prévue pour faire atterrir des futurs Concorde en provenance de New-York. Les caravelles d’Air-Inter ne sont pas oubliées pour rallier les principales villes du pays. Les DC8 d’Air France partiront vers Karl-Marx-Stadt, Stalingrad, la Tchécoslovaquie, la Rhodésie et le Congo-Brazzaville. M. Alain Poher aurait le privilège d’inaugurer l’aéroport… ».

Et si vous pensez qu’un aéroport ça fonctionne tout naturellement et ça ne peut que créer des emplois, rapporter des sous quand c’est construit, voyez ce site qui vous cite 😉 une quinzaine de superbes « bides » aéroportuaires, dont le mirifique et catastrophique « Mirabel » de Montréal, etc. Plus modestement, et tout près de Nantes, méditez sur les chiffres de l’aéroport actuel d’Angers-Loire, 18 ans d’âge, voulu par la communauté urbaine du coin parce que le précédent ne pouvait plus s’étendre… il est à 120 km à vol d’oiseau de NDDL, il fait gaillardement ses 8.500 passagers par an, soit 24 par jour… avec des structures prévues pour 50.000 passagers. Un « bide » de plus.

Tibert

(*) LES pistes ! pour NDDL il en est prévu deux, en toute modestie, comme à Londres-Heathrow, qui fait 1.260 mouvements par jour, quand le Nantes-Bouguenais actuel en compte à peu près 137, soit 9 fois moins. Mais on ne sait jamais, des fois que Nantes-NDDL supplanterait Heathrow…

Referendum est !

En latin le pluriel de referendum ce serait referenda, – merci maître Capello – mais c’est ici une question oiseuse : en France on a tous les ving-cinq ans au mieux UN referendum sur le feu, jamais deux, et c’est quand vraiment on est coincés, que toutes les solutions gouvernementales, autoritaires, politicardes, démagogiques ont été essayées et ont échoué. Allez je vais vous le franciser : « référendum(s) ». Parlons-en donc, et au singulier, comme de bien entendu.
Donc, voyons voir, ce futur référendum unique et exceptionnel, qui doit sortir Normal-Premier du bourbier de la querelle sur l’aéroport grand-nantais. Bonne idée : qu’en pensent les habitants du coin ? Idée stupide : si c’est d’intérêt national, ou même seulement régional, à quoi ça sert qu’on ait un exécutif ? hein, monsieur Hollande, à quoi ça rime ? un gage aux écolos de la dernière promotion ? C’est bien flou, tout ça… Je m’en vais tâcher d’éclairer votre lanterne. Un aéroport grand-nantais à 25 km de Nantes, contre 12 actuellement, pourquoi faire ?

Au fait, oui, pour quoi faire, cet aéroport ? si enfin les Français et nos visiteurs avaient le choix de quitter ou regagner leur pays en vol long-courrier ailleurs que par Roissy, Roissy le cauchemar, ça vaudrait le coup… alors nous aurions, au large de Nantes, un « hub » international ?  hélas ça ne se décrète pas, les compagnies se posent là où ça les intéresse, là où est le marché, et les étrangers s’agglutinent spontanément à Paris. Qu’iraient-ils foutre au large de Nantes, à 400 kms de Paris ? prendre un train pour s’y rendre en deux heures ou plus ? une navette pour visiter la Grande-Brière en barcasse ? la maison natale de René-Guy Cadou ? le Passage Pommeraye ? c’est au Moulin-Rouge qu’ils rêvent d’aller.

Pour les malheureux Rennais qui prennent l’avion à Nantes ? ça leur ferait plus court, ça éviterait de traverser la Loire… sauf que les Rennais ne vont plus guère prendre l’avion à Nantes, ils atteindront Paris par le TGV en moins de 1 h 30 dès 2017. Les Sarthois ? pas concernés, trop près de Paris. Les Angevins ? comme Rennes, Paris est si vite atteint… les Mayennais ? encore plus près de Paris que les Rennais.

Pour les Nantais ? l’aéroport nouveau sera nettement plus lointain, avec des liaisons non encore définies, alors que le tramway les amène actuellement à un jet de navette (courte et gratuite) de leurs avions pour le prix d’un billet urbain. Enfin, les Vendéens sont chauds partisans du statu-quo, ça leur fait bien plus court.

Pour permettre un trafic plus important ? il y a encore boucoup de marge à l’aéroport  actuel avec sa piste unique : voir Genève, et d’autres, à piste unique et qui ont un trafic bien supérieur. Tenez, lisez ça, ça confirmera ce que j’avance, ils sont d’accord avec moi.

Pour éviter de survoler Nantes à basse altitude ? (quant au lac de Grandlieu les jours où les vents ne sont pas de Sud-Ouest : on s’en fiche, ça n’effraie que les aigrettes et les pluviers). Excellente raison, sans doute la seule qui vaille. Eh bien demandons aux habitants de la communauté urbaine de Nantes, c’est eux seuls que ça concerne… qu’ils cochent la case :

– Oui –  ils veulent qu’on éloigne ce putain d’aéroport, pour qu’enfin on ne voie plus les avions faire du rase-toitures au dessus de la Tour de Bretagne ; ça coûtera ce que ça coûtera.

– Non – ça ne les empêche pas de dormir, et les inconvénients (béton à gogo, circulations chamboulées, éloignement, coûts d’accès…) seraient plus importants que les avantages.

Voilà, cher Président…  c’est-y-pas plus clair comme ça ? hein ? heureusement que Tibert, LE-Tibert-le-Chat est là, et qu’il veille.
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Je change de sujet… un joli néologisme, ça vous irait ? je lisais ceci hier dans un bouquin espagnol – ‘L’imposteur’, de Javier Cercas : « Le pire ennemi de la gauche est la gauche elle-même ; c’est à dire : le kitsch de la gauche ; c’est à dire : la conversion du discours de gauche en une coquille vide, en un sentimentalisme  hypocrite et de pacotille que la droite a qualifié de bonisme« . Ce bonisme me plaît, ça dit bien ce que ça veut dire, ça ne dépare pas dans le groupe lexical de la Bonne-Pensée : bien-pensance, bien-pensisme, politiquement-correct, bref le discours culpabilisant à oeillères intégrées. Tenez, je vous en fais un aperçu : C’est 1) la faute de la société ; 2)  ou alors la nôtre ; 3) ou bien les deux.

Tibert

Obsolète avant que de naître

Nous Français avons une spécialité que le monde nous envie : les usines à gaz, les paquebots, les cathédrales. Je suis d’accord, ça fait des spécialités, pas une ; c’est une image, ami lecteur, pour évoquer des créations pharaoniques, énormes et complexes. Exemples le Concorde, le viaduc de Millau, l’aéroport de Roissy, le système de réservation de billets SNCF… parfois ça aboutit, parce qu’on s’est obstiné et que le paysage n’a pas changé au long du projet ; souvent ça capote, ou ça part en eau de boudin, parce que 1° c’est trop complexe et très long à réaliser,  2° pendant qu’on travaillait le paysage a changé… et quand c’est fini et qu’on lève enfin le nez, on se retrouve comme l’inventeur de la machine à repasser les faux-cols : ah zut, on ne met plus de faux-cols.

J’ai vu s’élaborer il fut un temps, une « usine à gaz » informatique : 4 ans de travaux, une ambition européenne, ça faisait tout automatiquement, tout était prévu… sauf que 1° pendant ce temps-là Internet avait bouleversé la façon de programmer, 2° les législations avaient évolué, 3° les programmes étaient trop lourds et répondaient trop lentement, donc inexploitables. Et que fit-on ? eh bien on mit à la poubelle le superbe, grandiose et magnifique projet. Fort heureusement pour le pays, c’était un projet privé, et le contribuable n’en a pas souffert.

Mais concernant le projet de l’Ayraultport de NDDL, comme on dit maintenant, comment que le contribuable il est concerné ! comment que la terre agricole à quelques milliers d’euros l’hectare va se transformer en aires de parkings, parkings chichement mesurés en largeur(*) mais royalement tarifés 4 euros de l’heure entre deux traits de peinture blanche ! eh bien cet aéroport, on le sait parce qu’enfin la presse s’est avisée qu’il y avait de la copie à tartiner, a été conçu, envisagé il y a des lustres ! 1965… 47 ans ! et rien n’a changé aux alentours ? les crises pétrolières, le réchauffement climatique, Internet, la téléphonie mobile, l’Europe, les trains à grande vitesse, la crise de la dette, ça n’a rien modifié du contexte de ce projet ? allons, messieurs…

Il y a plein d’aéroports dans le Grand Ouest (dans le Petit, je ne sais pas), Nantes Angers St-Nazaire et Rennes ; les trois derniers roupillent doucement… Celui de Nantes est mono-piste ? pas assez gros pour l’immense prestige de cette magnifique ville ? mais largement assez gros pour accueillir encore plein de passagers, vu que Genève, monopiste aussi, a accueilli l’an dernier 13 millions de passagers, contre moins de 4 à Nantes. Alors où il est le problème, comme on dit dans les talc-chauds ? les Français n’ont pas très envie – c’est une litote, là, je vous ai fait une litote – de raquer et raquer encore, pour engraisser les actionnaires de Vinci ou similaires, pour le béton-pour-le-béton, les rocades, les rond-points, les radars, les ralentisseurs, les péages, les dessertes cadencées, les… j’en oublie sûrement, pour enlaidir inutilement le Nord de Nantes. Messieurs les décideurs, revoyez votre copie, errare humanum est, perseverare etc etc.

Tibert

(*) J’en reparlerai, on a vachement intérêt en France à développer les bagnoles à portes coulissantes, vu que les emplacements de parkings façon Effia, Vinci etc… sont ridiculement étroits. Tenez, celui de « la Comédie » à Montpellier : coups de portières garantis, tant les places sont étroites. Evitez les grosses limousines…  que dis-je, les limousines ! évitez les bagnoles de taille normale, ça craint.