( « Victory belongs to the most tenacious » : c’est le slogan de Roland-Garros, au fronton des tribunes de tennis, et pas traduit ! On est content de l’apprendre, en anglais, et l’on constate que les doctes pondeurs de maximes ronflantes et creuses s’essuient les semelles sur notre langue – certainement pas une démonstration de servilité lèche-bottes, non non, mais une volonté d’universalisme ? rappelons-leur que a) aucune loi n’a jamais institué l’anglais comme langue planétaire ; b) les étrangers auraient eu l’occasion d’apprendre quelques mots de français : La victoire va au plus tenace. C’est aussi creux, mais plus court et plus harmonieux. Eh bien, c’est loupé. )
Mais passons… j’ai pu lire une tribune copieuse, émanation de N associations comme Attac, LDH, Oxfam… de la gauche labellisée pur beurre. Intéressant manifeste, intitulé « Boire ou gaspiller, il faut choisir » . Bigre ! pas d’autre choix ? boire, et irriguer, et produire intelligemment, ce n’est pas possible ? Vous vous ferez votre opinion, cet article a le mérite d’alerter sur la pénurie d’eau qui menace. Mais quelle belle couche d’idéologie ! outre l’écriture inclusive, évidemment (*) – un marqueur « de gauche » ritualisé, ceux qui y manquent vont se faire bientôt traiter de fachos – on y relève des analyses curieuses. Tenez : « souhaitons-nous continuer à privilégier un modèle d’agriculture intensive et destructrice, entre prélèvements excessifs et méga-bassines, au détriment d’une agriculture paysanne, nourricière et économe en eau ? » . En somme, allez hop, les bassines sont forcément trop grosses et pour les gros, quand l’agriculture « paysanne » (qu’est-ce qu’une agriculture « paysanne » ? ) a toutes les vertus, sans qu’on nous en donne une définition.
Plus loin : « … placer l’intérêt général devant celui des classes privilégiées et des secteurs économiques polluants, afin de poser les contours d’une société de demain égalitaire… » . Diantre ! la société de demain sera donc égalitaire. Je déteste ce concept, qui m’évoque la mornitude pesante de la RDA, l’étouffoir, la blouse grise pour tout le monde. A grands coups de clichés simplistes, on nous somme de choisir (la deuxième option, ne vous trompez pas !) entre « l’arrosage de golfs et le fonctionnement de complexes hôteliers avec piscines et spas, ou les potagers des particulier-ères » . Voilà : le riche (le très-très riche ne sert d’ailleurs à rien, selon madame Tondelier) arrose – ouups ! fait arroser – le green de son golf ; le/la « particulier-ère » arrose, chichement, goutte-à-goutte, ses salades. C’est le pot de terre, quasi vide, contre le pot de fer plein à ras bord. C’est Dickens, c’est Zola… tenez, mettez-moi les deux.
Tibert
(*) Le « chapeau » qui introduit cette tribune n’est pas, lui, de cette mouture grammaticale « les femmes-et-les-hommes » ; il y a encore des journaleux qui écrivent en français. On leur est reconnaissant – moi, du moins.