Nabot, guenon et dessert lacté

Hier fut une journée à marquer d’un blanc caillou dans la saga des postures télégéniques de nos députés : eh oui le mercredi au Palais-Bourbon, c’est la télé !  l’occasion de briller sur les écrans et dans les foyers. On vit donc, c’est assez rare, une chouette mise en scène, une solennelle protestation orchestrée par un ténor du PS contre les attaques racistes et de mauvais goût (*) dont fut récemment l’objet madame Taubira. Ce ne fut pas une standing ovation dans l’hémicycle, mais tout comme, et notre Garde des Sceaux en fut émue, on le vit visiblement à ses yeux. Et même la Droite se tint bien en cette occasion, sans gesticulations ni ricanements, juste bien.

Mais hélas les indignations – « indignez-vous, rindignez-vous« , qu’ils disaient – sont borgnes, sinon plus, et fort sélectives. Il me souvient que le physique de monsieur Sarkozy, notamment sa taille modeste lui a valu en son temps de délicats « nabot », sans que les députés s’en émeuvent ni ne se lèvent en séance pour marquer le coup ; que Normal-Premier se tape un surnom de dessert lacté d’aspect jaunasse et gélatineux, que l’austère Jospin, en son temps, etc etc… sans oublier le spirituel « gros cul » attribué à notre verte Duflot.

Pour prendre deux termes très moches, « nabot » et « guenon », je ne vois pas de différence de traitement : ce sont des attaques basses, basées sur un physique pointé comme différent et dérangeant alors que c’est la personne, son action, sa politique, qui sont visées. L’un est raciste, l’autre pas ? c’est vite dit, et sommaire, tant le mot « racisme » est dilué aujourd’hui, jusqu’à ne plus guère signifier que la haine de la différence. Pour moi c’est de la même eau, boueuse.

Les noms d’oiseaux en politique ne datent pas d’hier, cela va de la pique spirituelle et méritée à l’attaque déshonorante. Hélas il n’est pas d’impartialité dans la réprobation des insultes indignes : mesdames-messieurs qui vous indigniez hier, vous a-t-on vus condamner vigoureusement en leur temps les attaques ad hominem haineuses qui brocardaient le physique du précédent Président ? pas que je sache. Voilà qui permet de douter bigrement de la pureté de vos vertueuses postures.

Tibert

(*) On apprenait par la même occasion que, non content de comparer madame Taubira à une guenon, des gamins de familles membres de la « Manif pour tous » avaient brandi des bananes à son adresse ; on reste là dans le même registre : ça ne vole pas haut, pour employer une litote.

Attention à ce que vous dites

Les Etats-Uniens nous guettent, la NSA aux grandes oreilles. Qui sait ? pendant que je claviote sur mon ordinateur, il y a un espion qui machouille du chewing-gum, boit du Koka en rotant, direct dans le trou de la canette en alu, et note tout ce que je divague ? c’est inquiétant. On ne va pas pouvoir tout mettre noir sur blanc, j’en ai peur.

Les procès nous guettent. Madame Taubira offensée, le FN offensé aussi sec, c’est le ping-pong judiciaire. A Marseille la Droite des élus monte sur ses grands chevaux car leur futur adversaire désigné par le PS aux Municipales a qualifié sa collègue et camarade de parti, madame Ghali, de, tenez-vous bien, « arabe » ! C’est désormais, paraît-il, une injure, « arabe ». La péninsule a…ique ? la gomme a…ique idem ? la musique a… ? l’alphabet a… ? que des injures, je vous jure, on s’en doutait pas. Dans la même logique, il convient urgemment de décréter indicibles et proscrits des mots abjects tels que « Blanc », « Européen », « Caucasien », « Asiatique », j’en oublie… si ça se trouve, « passe-moi le sel« , ça va se révéler un gros mot – et pendant ce temps-là la NSA prend bonne note.

Glaçage sur le millefeuilles, le PDG de Titan, ce cow-boy texan fabricant de pneus, qui finalement, faut voir… il se tâte… va peut-être reprendre l’usine Goodyear d’Amiens en déshérence chez nous, il s’y colle, lui aussi : il « insulte la CGT » !  qu’a-t-il donc dit ? « La CGT, ce sont des timbrés« . C’est inadmissible, comme dirait monsieur Valls. Cependant, voyez, il se rattrape un peu, il a perçu qu’il est allé trop loin, traîné dans la boue amiennoise l’avant-garde éclairée du Prolétariat ; il adoucit alors son propos, il met des cubes de glace dans son Merlot : « Il doit bien y avoir quelques leaders à la CGT qui ont un cerveau« , concède-t-il. Vous voyez, le bon sens finit toujours par triompher.

Tibert

Quand ça me soungue

Encore l’écologie ? eh oui, encore.

J’avais acheté, en mars 2011 – il y a 2 ans et demi – un périphérique informatique de marque coréenne, au prix d’environ 150 euros. Evidemment les « consommables » consommés depuis se sont révélés assez chers mais bon, on consomme, non ? alors consommons, c’est autant de moins à déclarer en patrimoine pour les gloutons de Bercy.

Elle est tombée en panne, cette machine, il y a 2 jours… je téléphone au SAV central, un 01..quelquechose au tarif d’une communication locale, bof, pourquoi pas, et là on me donne le téléphone du SAV le plus proche (pas possible, je suppose, de le donner directement par internet, ce serait trop simple)  : c’est à 55 km environ. Je téléphone donc au SAV local ; une charmante dame me renseigne sur la procédure à suivre :

– il viennent chercher l’engin et le prennent en charge pour un devis de réparation : 95 euros.

– le devis de réparation effectué, soit XXX euros, on répare ou pas, c’est à moi de voir…

– coût de l’opération : pas réparé : c’est 95 euros ; réparé : c’est 95+XXX. Les 95 euros, de base, à débourser quoi qu’il arrive ensuite.

Je fais observer à la dame que je lui apporterai l’engin, donc pas besoin de frais de déplacement et de « prise en charge » : elle s’en tape, ce sera pareil, 95 euros forfaitaires.

Je fais observer à la dame que si la réparation me coûte 55 euros – une bricole, en somme – autant acheter du neuf : elle regrette, c’est comme ça. Je lui dis que cette machine est récente, en excellent état général, et que c’est vraiment idiot de la jeter : ben oui c’est comme ça, je regrette.

Moi aussi je regrette : la marque coréenne en question a sérieusement baissé dans mon estime. C’est nul comme politique de réparation. J’éviterai désormais soigneusement d’acheter chez elle. Et combien de kilos de gaz à effet de serre ça va nous faire en plus ? vous y pensez, au gaz à effet de serre ?

Tibert

Feux Verts

Mes Verts amis,  je pense que vous avez chopé la rougeole, grave (*), ou bien vous êtes daltoniens. Que le Mélenchon, son acrimonie et son écharpe rouge apprise de Tonton se répandent en anathèmes et vitupérations contre les roses et tièdes Socialistes, c’est dans la nature des choses : ils n’en feront jamais assez à ses yeux, les Roses, pour égalitariser et terniser ce pays selon le modèle 1917 revu 2012, sommairement dépoussiéré, relooké. Mais vous, qui fûtes verts ?

Que madame Joly, après son épatant bide aux Présidentielles, continue brillamment à aligner les vabures bervales et les incongruités, on sourit, elle ne représente guère qu’elle-même. Voyez comme, généreuse à notre place – pour notre bien à tous et le salut de nos âmes – elle s’étonne qu’après avoir, en 1961-62, assimilé sans trop de problèmes un million de pieds-Noirs, nous ne puissons en faire autant de quelque dizaines de milliers de Roms ! les Pieds-Noirs ont apprécié… l’immigration sauvage…

Mais que nos gouvernants Verts et les élus du même métal s’excitent sur l’affaire Leonarda, lamentable cacophonie rose-vert, et tentent de réactiver la marionnette lycéenne, de rallumer les ardeurs de ces jeunes gens prêts à hurler sur les causes les plus indéfendables, pourvu qu’elles soient séduisantes et sans nuances, que monsieur Placé, qui doit son confortable et durable fauteuil sénatorial (9 ans, c’est bien long)  aux accords rose-vert de 2011, se permette de jouer les boute-feu, alors là, si j’étais au PS je n’apprécierais pas. Déjà que le Premier Secrétaire dudit PS trouve que Moi-Président n’est pas assez gentil avec cette famille mi-kosovar, mi-italienne, mi-Rom qui a épuisé tous les recours légaux, les faux papiers et les déclarations fantaisistes pour tenter mordicus d’obtenir l’asile et les allocs ici, aidée en cela par d’aucuns pour qui la Loi républicaine n’est qu’un chiffon de papier, et qui veulent nous infliger leurs valeurs – les leurs.

C’est assez clair, l’épisode Leonarda est un montage, un piège à con pour couler le Valls, qui décidément gêne. Au passage, les revers de pantalons de Normal-Premier en ont pris un coup, dommages collatéraux ! L’acharnement insensé de la Gauche-gauche et de ses groupuscules spécialisés style RESF est bien normal, c’est leur jeu constant d’ouvrir nos bras à l’humanité tout entière, allez hop, soyez fous. Mais les Verts ? quel rôle jouent-ils dans cette machine de guerre ? en quoi l’accueil indû d’une famille fraudeuse au refuge politique s’inscrit-il dans un schéma écologique cohérent ? Placé, c’est Mélenchon avec une écharpe verte.

Tibert

(*) « grave » : c’est, rassurez-vous, un contre-exemple, ce qu’il ne faut pas écrire. Cet adjectif grave, justement, et de sonorité plaisante, se retrouve ici dénaturé, enlaidi, devenu adverbe rustique, sans nuance, panacée de l’expression sommaire. Moche, quoi.

PS : Monsieur Sapin, le ministre du boulot, annonce, navré, « Les chiffres du chômage demain ne seront pas bons… « . Je traduis : les chiffres du chômage seront mauvais. C’est pareil ? si vous voulez… dans « pas bons », il y a « bons », c’est moins pire que « mauvais », comme disent nos amis du Québec.

Boudiou, fan de chichourle, etc.

Hier soir aux infos, séquence video : monsieur Menucci, Patrick, hilare, présente aux journaleux massés devant l’urne socialiste et marseillaise son bulletin de vote primaire et socialiste  – rose, le bulletin, évidemment. La séquence dure et dure, interminable, sous les crépitements des flashes, et, au bout d’un très long suspense à deux balles, votera, votera pas ? ledit Menucci laisse tomber son bulletin dans la transparente boîte à votation. On a eu ainsi très largement le temps d’admirer la prestance satisfaite du futur adversaire socialiste de l’actuel maire de Marseille. On était gêné pour lui, heureusement que le ridicule ne tue plus.

Notez, on ne sait pas encore qui monsieur Menucci va affronter l’an prochain, si l’actuel maire de Marseille va se représenter, rempiler pour 6 ans de mieux. Faisons un voeu pour monsieur Gaudin : qu’inspiré par la Bonne Mère, les écailles lui tombent des yeux, et qu’il se rende compte que dans un pays de 4 millions de chômeurs au bas mot, les types comme lui qui auront presque 75 ans au moment des Municipales, carton de retraite plein – et une retraite de sénateur, excusez du peu – feraient mieux de passer la main. Non qu’il soit mauvais sénateur-maire, monsieur Gaudin, il fait très bien le cumulard Marseillais, langue qu’il parle couramment, mais parce que – je me fais, là, le porte-parole de tas de Français excédés par les lamentables moeurs parlementaires – il y en a marre de ces personnages, de droite comme de gauche, encroûtés et amorphes, vieux, qui plus est, et cramponnés mordicus à leurs biftecks pluriels ( il n’y a avait pas qu’un  bifteck, il y avait plusieursss bifteckssss, aurait dit Topaze). La vieillesse est un naufrage, disait De gaulle, et si ça continue monsieur Gaudin va nous refaire à Marseille les piteuses dernières années du Chaban-Delmas bordelais, qui ne lâcha les manettes de sa ville à bout de souffle (*) qu’à 80 ans.

Si encore monsieur Menucci laissait augurer de lendemains mieux gérés… hélas, ce que nous en avons vu hier s’inscrit plein pot dans le grotesque de la politique-spectacle la plus éculée. Marseillais, mes chers compatriotes, trouvez-vous un homme, une femme, peu importe, mais énergique, intègre, compétent(e). Ca doit bien pouvoir se trouver, non ?

Tibert

(*) à bout de souffle : la ville, ou le maire ? les deux, mon général.

Après vous… mais non, je n'en ferai rien…

On marche de plus en plus sur la tête dans ce pays, et les symptômes se précisent et s’accumulent. Le Monde d’hier soir nous titre, et c’est manifestement triste à ses yeux, « Quand on appelle le 115, mieux vaut être Français« . Le 115, c’est le téléphone de détresse sociale, « Au secours je suis dans la panade« , bref sans feu ni lieu. Un numéro que de plus en plus de sans-logis sollicitent, tant cette époque est moche. Et Le Monde nous apprend donc que les hébergements d’urgence sont saturés, que les places manquent, que c’est pour le 115 comme dans l’immobilier locatif à Paris, ou comme les dossiers à Popaul-Emploi, ou les places en prison : ça ne suit pas, on n’y arrive pas.

Et donc, au 115, nous dit Le Monde, manifestement choqué, on privilégie les appels de nos compatriotes. Vous vous rendez compte ? la France, le Pays des Droits de l’Homme venu d’ailleurs ?

Ben oui, on fait ça, chez nous, et c’est, excusez-moi, normal, s’agissant d’une situation de pénurie. Ce qui ne serait pas normal du tout, carrément anormal, ce serait l’inverse. D’ailleurs la très grande majorité des démocraties – ne parlons même pas des régimes autoritaires, où il n’y a rien à discuter – donne la priorité à ses ressortissants, et pas que pour le 115 : pour l’emploi, pour les alloc’s, pour la santé, et j’en oublie. D’aucuns nomment ça la « préférence nationale », et ça a très très mauvaise presse –  surtout auprès des gens qui n’en ont pas besoin.

Evidemment, l’idée, la gentille et joulie idée sous-tendue dans le papier du Monde, c’est qu’il faudrait être équi-charitable : hélas c’est infaisable, quand il s’agit de coups de téléphone, où beaucoup s’expriment difficilement, etc. C’est infaisable, et zut, si être Français ne donne droit qu’à payer sur ce sol des taxes et des impôts, autant se flinguer tout de suite. Ou donner carrément l’exclusivité du 115 aux migrants, ce sera plus clair. On pourrait alors ouvrir un 116,  pour les Français, en situation de pénurie lui aussi, bien entendu – mais là il va y en avoir qui vont hurler à la discrimination.

Tibert

Sur l'exceptionnalité des Valeurs

Un joli pied de nez de monsieur Lucchini, l’acteur, au Pujadas de service vespéral sur la messe du 20 heures à France 2, et qui l’asticotait, ksss kss, savoir s’il était de gauche, ah non, ah bon ? et pourquoi donc ? : « faut être exceptionnel quand t’es de gauche« , articule Lucchini, ronron façon Bébert (*), l’oeil pétillant derrière ses lunettes, se foutant manifestement de son interlocuteur. Tenez, c’est court et savoureux, profitez-en pendant que c’est là.

Eh oui, être de Gauche c’est extrêmement exigeant, et pour ça il faut mettre SES valeurs supposées au dessus des lois de la République, et s’y tenir, même si on clame urbi et orbi son amour pour la République, même si on est un élu de la République, et qu’on est à l’origine de ces lois ! Le pathos gonflé tel un soufflé sur l’affaire de cette collégienne retournée au Kosovo avec sa famille fait peine à voir : une lycéenne révoltée nous explique que c’est insupportable, révoltant, justement, de voir une chaise vide dans la salle de classe, alors que la veille, elle était occupée : et en cas de gastro-entérite, on fait quoi ? comme dirait l’autre. Une élue Verte nous assure que ça rappelle Les Heures Les Plus Sombres De Notre Histoire – la Shoah, allez hop, la rafle du Veld’Hiv’ – et SaMère, l’ex-Vert du Bordelais, qui, moustache frémissante d’indignation, réclame la démission du Valls… belle exposition de Valeurs. Mais les lois ? mais les nombreux recours et procédures engagés par le père de la gamine, et constamment rejetés ? ils s’en foutent, faut que ça mousse un max.

Fort sagement, le gouvernement, écartelé entre « y a pas faute » (ça serait sa faute)  et « faut être humain » (ils sont de Gauche, tout de même), va nous re-re-faire l’enquête, nous a assuré monsieur Ayrault, savoir si on a loupé un alinéa dans la procédure. Nous voilà rassurés.

Mais rappelons-nous : au dessus des Lois, il y a les Valeurs. Les Valeurs des autres.

Tibert

Bébert, le matou… le matou de Céline, l’écrivain… il avait des références, Louis-Ferdinand : Bébert, affectueux diminutif pour Tibert, Tibert le chat littéraire.

Fronts et sauces républicaines

(Note liminaire : il y aquelques jours, le Fig’N’importe-Quoi titrait en Une : « Nouvelles manifestations contre les retraites« . C’est en fait « Nouvelles manifestations contre la réforme des retraites » qu’il fallait comprendre : en gros, l’inverse de ce qui était développé ensuite, vous comprenez ? parce qu’un titre, faut faire COURT, coco ! on s’en tape si ça veut dire l’inverse, ou rien du tout.

Mais, à nos moutons…qu’est-ce qu’un front républicain ? chers auditeurs, vous le savez comme moi : c’est une initiative qui amène deux formations politiques, qui d’ordinaire se foutent impitoyablement sur la gueule, à se serrer les coudes car la République est en danger, rien que ça. Et il paraît qu’à Brignoles, dans le 8-3, le front-machin, là, eh bien, il a craqué. Il a craqué, disait monsieur Ayrault. Il a craqué, eh oui : il n’a pas pu empêcher le FN de passer. UN élu FN aux cantonales ? la République est en danger.

Il existe en fait (*) plein de fronts du même métal ; fronts moins scintillants que le prestigieux Front Républicain, car la République n’est pas menacée, juste un peu chahutée. « Je te laisse Coulommiers, tu me files Avranches« , «  Tu mets un poil d’écolo dans ton programme et je te rameute mes voix« , etc. Des fronts-tambouille… un front PS-EELV au printemps 2012 a ainsi permis aux écolos-verts, moyennant certaine bucolisation du programme du PS, de faire front avec ledit PS et bénéficier ainsi de sièges bien douillets au gouvernement ou dans les diverses assemblées, malgré des scores électoraux minables, voire calamiteux. Voilà, ça sert à ça, un front normal.

Le front « républicain », lui, l’estampillé, sert en clair à empêcher le FN –  qui tourne régulièrement autour de 16-18 % des préférences des Français – de figurer dans les diverses instances représentatives : ce sont des 16-18 % pas valables, contrairement aux scores des micro-partis façon EELV ou NPA, qui sont, eux, des 2-4 % valables. Et pourquoi pas valable ? parce que, clament les autres, le FN, lui, n’est pas républicain ; extrême-droite, fasciste, un tas de noms d’oiseaux, mais pas républicain. Populiste, disait il y a peu madame Hidalgo : populiste DONC pas républicain. On appréciera la logique simple et implacable, s’agissant de deux « mots-valises » dont on peut faire des pages et des pages d’interprétations.

(Au fait, dans la même interviouve, Madame Hidalgo avançait que le FN n’avait «  jamais joué dans l’espace républicain« . C’est évidemment un gros mensonge : le FN a bien eu un groupe à l’Assemblée dans les années 1986, avec 35 élus (grâce à monsieur Mitterand et la « proportionnelle », qu’on se dépêcha vite de remballer, c’est trop dangereux).

Bref : le « front républicain » est un faux-nez, un euphémisme pour « front anti-FN » ; madame Le Pen le nomme front « UMPS », et c’est ma foi un raccourci qui se vérifie bien. Si le FN « joue si peu dans l’espace républicain », c’est que, justement, le système uninominal à deux tours + le « front républicain » ont jusqu’ici à peu près réussi à l’empêcher de « jouer dans l’espace républicain », où s’ébattent tous les partis auto-proclamés républicains. « Républicains », ah ça oui, avec leurs cumulards même-pas-honte, leurs professionnels recuits de la politique, leurs vieillards indéboulonnables et cramponnés à leur hochet, leurs intègres Ministres du Budget, etc. Elle peut dormir sur ses deux oreilles, la République, tant que le Front Républicain fonctionne.

Tibert

(*) « en fait« , c’est l’actuelle tarte à la crème du langage parlé. En fait ça n’est pertinent que dans 10 % des cas, mais les « en fait » (pas les amphèt’s), ça meuble, ça permet de temporiser, ça importance le discours, ça le fait mieux, en fait.

Un Monde de beau linge

Quand par malchance on n’a pas accès au Houèbe, on achète le journal en papier, pour ne pas louper, par exemple, les palpitants épisodes de la juste lutte des taxis parisiens contre l’intérêt général des Parisiens, qui semble archi-secondaire. Mais passons. Donc, le journal… le journal du vendredi soir, le Moonde (daté du samedi), c’est vendu  avec supplément obligatoire, un magnifique magazine papier glacé, joulies photos et articles soignés. Le Moonde du vendredi soir coûte 3,50 euros avec tous ses suppléments, le magazine et divers feuillets ; soit 1,70 euro de plus que d’hab’. Pour ce prix on a droit à du rédactionnel, et du solide, non ?

Rédactionnel solide… il y en a, c’est vrai, sur la jeunesse de Téhéran, sur la parano des Parisiens qui bossent à St-Denis (93). Et deux-trois portraits estimables sur des gens intéressants. Voilààh… et puis, et puis, un article de 4 pages, très élogieux, sur la maison Arnys à Paris dans les quartiers huppés, qui habille un tas d’hommes célèbres ou riches, ou les deux. Et, le croirez-vous, on nous apprend que Normal-Moi en personne y est venu voir, mais a renoncé à s’y faire confectionner ses costards, c’est trop cher pour lui ! à partir de 6.000 euros la bête, on le comprend, ça fait cher le bout de tissu. Mais show-bizz, politiciens, écrivains, hommes d’affaires… ils sont légion à se presser chez Arnys, que du beau linge parisien – les socialistes sociaux et les UMP libéraux s’y cotoient avec civilité. Bref : Arnys, si vous êtes pété de thunes et affectionnez de vous vêtir bien bourge, bonne adresse. Moi j’appelle ça du « publi-reportage », mais j’ai mauvais esprit.

Et puis, feuilletant le magazine, j’ai été frappé par le nombre de pleines pages de pub’ pour les fringues et chaussures masculines, et pas du Tatu ni du Kiabu, non : que de la belle griffe, vous pensez bien. J’ai donc consciencieusement établi la liste exhaustive de ces pubs grand format trouvées au fil des pages, outre la maison Arnys et deux quasi « publi-reportages » sous couvert de belles photos («  Henri-Charles Dugenou porte ici une cravate Cecicela de chez Schmoldu, une veste cachemire-soie griffée MonLapin, chaussures Crokno de chez HypeShoe« , vous voyez le genre) : j’ai dénombré 27 marques qui souhaitent vous fourguer, via le magazine du Moonde, des vêtements ou des chaussures.

Ralph Lauren – Saint Laurent – Giorgio Armani – Gucci – Ermenegildo Zegna – Bottega Veneta (ah là c’est une femme !) – Canali – Brioni – Kenzo – Carven – Lanvin – Hugo Boss – Paul Smith – US.Polo Assn – Strellson – Cerutti – Peuterey – Marc O’Polo – Tommy Hilfiger – Woolrich – De Fursac – IKKS – Levi’s – Aigle – Geox – American Vintage – Dior.

Voilà. Notez, ce n’est pas tout, on a aussi Rolex, Bell & Ross, VW, Nespresso, Hyundai, Samsung, Toshiba, Renault, Novotel, Lindt, Rivages du Monde, qui, eux, ne vendent pas de fringues. Et, ah oui j’oubliais : Sotheby’s. C’est pour vendre une gentille gentilhommière à Menton (06), mise à prix 22 millions. Sur le papier ça a l’air pas mal.

Mais quelle est donc la cible du Moonde-magazine du vendredi soir ? c’est Vogue-hommes, ma parole ; le Fig’Magazine n’est pas loin non plus. Parisiens illustres, Parisiens branchés, vêtez-vous cher, vêtez-vous riche.

Poudrage de cacao sur le Tiramisu : une pub pleine page pour le « Musée du Monde », des cahiers à se procurer semaine après semaine, sur des thèmes de beaux tableaux de grands peintres. Le prix du cahier : 5,99 euros. Là, sur ce sournois centime manquant de prix vicieux qui ne veut pas avouer ses 6 euros, on rejoint, naturellement, la grande famille des vendeurs de chaussettes sur les tréteaux des marchés.

Tibert

La i-Catastrophe, ou mon i-chéri

Il en est parfois des textes comme de ces mots qu’on prononce dans le calme feutré d’un cabinet, allongé et tournant le dos à une silhouette supposée attentive et flottante, bien que carrée dans un fauteuil : ils font sens.

Tenez : le Figues’areu areu, encore lui, nous régale d’un scoop réchauffé sur la catastrophe ferroviaire de Brétigny : il y aurait bien eu des dépouilleurs d’accidentés, des chacals de déraillement, des vautours de scène de désolation, contrairement aux dénégations officielles « dormez braves gens, tout est calme, la situation est sous contrôle« . Des salopards ont volé des effets épars sur les voies, ou sur les cadavres, allez hop,  pas de sentimentalisme.

Et volé quoi ? « Il s’agit de vols de téléphones portables, d’iPhone, d’appareils électroniques ou encore de bagages« , écrit le journaleux. Voilà qui est extrêmement vague (des bagages…) et extrêmement précis : des iPhone ! (et aussi des téléphones mobiles, ou cellulaires, bref des « portables », selon la désignation courante et ambigüe).

Des IPhone et des téléphones portables… qu’est-ce qu’un iPhone ? un téléphone portable. Mais pas n’importe quel téléphone portable, pas de ces Samvung de mes deux ou de ces Suny à la noix : non, des iPhone, excusez du peu. Des montres et des Ronex, des bagnoles et des Portsch, des foulards et des carrés Herpès.

Ils ont volé des iPhone… La Marque A La Pomme. C’est épouvantable.

Tibert

PS : ça s’appelle en termes de journalisme du « publi-reportage », ou de la « publi-information ». Combien ça rapporte au canard qui passe ainsi la brosse à reluire à la maison MaPomme ? ça vous ne le saurez pas.