Quand le bâtiment va… grossir de 30 %

On le sait depuis hier soir, les immeubles de France pourront désormais, violant allègrement les règlements et normes sur les COS, gagner 30 % de surface sans paperasserie gênante : s’ils sont coincés latéralement, comme hélas souvent en ville, il leur sera donc permis de croître en hauteur ! exemple : un 6 étages + chambres dites « de bonnes » réhabilitées (relouquées) façon bobo, genre « rav stud, poutr-app, vue impr, cachet » (*)… disons 20 mètres de haut, cet immeuble, donc, va gagner 6 mètres, soit largement 2 bons niveaux, plus des chambres « de bonnes » qu’il sera possible de restyler façon bobo, etc etc.

L’histoire reste cependant assez évasive, et je dirais même que ça frise l’histoire belge – je m’explique :  est-ce qu’on a le droit d’agrandir les immeubles de 30 %, une fois ? parce que si c’est récursif, si l’on peut rehausser de 30 % un immeuble fraîchement remonté de 30 %, et qui  venait justement d’être étiré etc…  on va construire des gratte-ciels pas terribles !

Autre interrogation : les voisins vont peut-être apprécier moyennement leur nouvelle vue imprenable sur un beau mur surélevé… leur restera à rehausser suffisamment leur immeuble et acquérir le dernier étage pour retrouver leur panorama grandiose sur les poteries de cheminées et autres toitures en zinc. Et donc, les voisins des voisins, eux-mêmes, etc etc…

Mais bon, c’était juste un détail : c’est à n’en point douter une excellente initiative de notre Président-en-Chef –  qui n’a pas oublié que « quand le bâtiment va, tout va« , ça c’est bien vrai ça !  – et laisse enfin augurer d’une évolution positive, d’une rapide et ébouriffante sortie de crise. Et, l’astre butte notre liste, la vraie bonne nouvelle, c’est que les promoteurs vont enfin pouvoir nous construire des hauteurs sous plafond décentes ! ça les chagrinait, vous pensez…  au lieu des minables 2,5 mètres rikiki où ma grande perche de fiston se cogne au plafond en se passant un coup de peigne, ils vont nous faire du 2,5 x1,3 = 3,25 mètres. Un rêve : on va même pouvoir se faire une mezzanine, mémé !

Bébert, 30 % plus haut

(*) … et 7 étages à monter à pied.

A peu prèspuce

Un passionnant article du Monde-sur-Toile reprend ce marronnier médical inoxydable, ce thème incontournable, cyclique et récurrent : l’ablation systématique et généralisée des prépuces.

C’est en effet grâce à l’Afrique et à ses tourments viraux que cette brûlante question revient en boucle. L’Afrique et son Sida galopant. Pas de capote (merci Benoît n° 16), peu d’hygiène, et il y fait chaud, et la chair est faible. Circoncire (les hommes, NDLR, ça va sans l’écrire mais bon…) les protège un chouïa des infections de type VIH transmises par les femmes. Tel est le constat statistique et scientifique qui permet aux sécateurs fous de prôner l’ablation prophylactique et universelle de cet astucieux et fort utile bourrelet grossièrement cylindrique qui coulisse et protège. Mais cela ne va pas sans soulever un certain nombre de questions…

– Dans cette hypothèse, je vois mal comment les Juifs et les Musulmans vont arriver à se différencier des mécréants, des Goyim et des Khoufars. Zut quoi, si l’on ne peut même plus se reconnaître entre confrères… leur restera à inventer une nouvelle et rituelle différenciation – je ne sais pas, moi, mais de ce côté là je suppose qu’ils n’iront pas plus loin dans l’ablation, ce serait carrément mutilatoire et dommageable.

– Quid des femmes ? pourquoi un rapport statistique et scientifique d’un quelconque organisme Onusien ne nous apprend-il pas que l’ablation systématique et chirurgicale de l’hymen dès le bas âge protège d’une ultérieure défloration douloureuse et sanglante, permet d’éviter de salir les draps lors de la nuit de noces, et – cerise sur le gâteau – évite de saigner un poulet aux fins de faire croire à la famille (*) que la mariée était vierge ? tout bénef’.

– Je me lave, tu te nettoies – et si ce n’est toi c’est donc ton frère, nous nous lavons le prépuce, sous le prépuce et le reste avec… tous les jours. Qu’on ne vienne pas me raconter que le prépuce, c’est sale. C’est sale si on ne le lave pas.

– Je suis né porteur de prépuce, comme beaucoup ; je n’en suis pas plus fier pour autant, mais je suis bien dans ma peau (de prépuce), nous vivons en bonne entente lui et moi, et la seule mutilation rituelle que j’aie jamais subie, c’est la section du cordon ombilical. Je suis d’ailleurs bien conscient que c’était nécessaire à mon indépendance physique. Donc, sécateurs rituels ou prophylactiques, passez au large, on ne vous a rien demandé. Dieu s’en fout, des prépuces, si vous saviez à  quel point ! allez donc couper vos rosiers, élaguer vos arbres fruitiers, rogner les ailes des poulets, châtrer les matous, il reste du pain sur la planche à découper sans emmerder les prépuces.

Bébert

(*) … famille qui n’est pas dupe, mais bon, c’est pour les voisins – quant aux voisins, personne n’est dupe, mais bon, c’est poli de faire semblant.

Barthes, Angelopoulos : tableau de chasse

Tout le monde sait que les piétons payent chaque jour un lourd tribut à la circulation auto-moto-bus’omobile. D’autant plus qu’en France, et spécialement à Paris etc… le piéton n’a que foutre des signaux de voirie, rien à cirer des passages qu’on lui a réservés, se contrefiche des flux de véhicules, et se prend pour le matador esquivant le toro, olé !!

Mais comme  dans la blague bien connue (*), ce n’est pas toujours le matador qui gagne, hombre ! Notre regretté Roland Barthes a payé de sa vie une rencontre inopinée avec un autobus, il y a de cela quelques lustres. Et nous apprenons, hélas, que le célèbre cinéaste Théo Angelopoulos vient de se faire  buter par une moto. C’est aussi une lourde perte : j’avais beaucoup aimé l’Apiculteur, Paysage dans le brouillard, l’Eternité et un jour… ça nous changeait agréablement des Bidasses en folie et de Retour vers le futur IV. Ce sont évidemment et comme toujours les meilleurs qui s’en vont.

Mais, quand même, on s’interroge : que foutait donc Théo Angelopoulos à 8 h 30 dans une rue improbable du XIV ème arrondissement à Paris ? par quel malheureux hasard un motard de l’escorte de la Ministre de l’Artisanat – grandissime poste, qui vaut bien DEUX motards, des gyrophares et une sirène hurlante –  a-t-il pu percuter ce génial et imprudent cinéaste ? quand on y songe, on est peu de chose. Je cite :

« Le convoi se composait d’une voiture berline Renault (**) escortée par deux motards de la police, et se dirigeait vers la porte d’Orléans. Il se rendait à l’aéroport militaire de Villacoublay pour rallier Toul, fief de Mme Morano ».

Voilà, c’est simple, et c’est tragique. Il eût suffi que le convoi de madame Morano se dirige, sirènes hurlantes, vers son fief de Toul (place, manants, place au convoi de la Ministre de l’Artisanat…) en empruntant – toutes affaires cessantes, sirènes hurlantes et gyrophares girotant – le boulevard Sébastopol, l’autoroute du Nord et l’aéroport du Bourget, et Théo Angélopoulos était sauvé ! qu’avait donc la Ministre de l’Artisanat de si urgent à faire dans son fief (***) de Toul, l’histoire ne le dit pas. Pourquoi une Ministre de l’Artisanat utilise-t-elle un aéroport militaire, nul ne le sait. Pourquoi le TGV Paris-Nancy-Strasbourg ne convenait pas à ce noble déplacement, on l’ignore. Ce tragique fait d’hiver gardera tragiquement ses zones d’ombre.

Tibert

(*) vous la connaissez ? c’est un type qui va dans un restaurant espagnol et y déguste un plat excellent à base de … ah vous la connaissiez ? eh bien alors pas la peine que je vous la raconte.

(**) Une Twingo Diesel jaune moutarde, selon nos informations ; madame la Ministre était à côté du chauffeur en costard-casquette et avait les pieds sur le tableau de bord.

(***) Fief : « Terme de féodalité. Domaine noble, relevant du seigneur d’un autre domaine, concédé sous condition… »

Médecine de (casque à) pointe

Une mienne connaissance, vieux corps mâle fatigué, a eu la mauvaise idée de se déclarer une méchante maladie veineuse sous l’équateur… à Singapour plus précisément. Impossible de rentrer dare-dare et ventre à terre sous nos cieux et la douce protection de la Sécu, on l’a donc soigné sur place. Et bien évidemment, anti-coagulants, mesure religieuse du taux de prothrombine, et du fameux indice international de « fluidité » du sang, j’ai nommé l’ INR. Là-bas, ils utilisent un petit appareil, de la taille d’un sabot de paiement Carte  Bleue – on vous pique le bout du doigt, on tartine une petite bandelette de réactif d’une goutte de votre précieux sang, on attend une minute en papotant… et zboinnnng, le résultat : avec de la chance, hopefully comme ils disent, ce sera entre 2 et 3, disons 2.8 comme sur mon illustration.

Un petit appareil très pratique et inconnu en France
Appareil de mesure INR instantanée

Notez bien que ces petits machins sont en vente libre sur la Toile, au Canada, en Asie, un peu partout. Autour de 1.000 dollars.

Bon, de retour en France, mon brave ami continue son traitement… ah non cher monsieur, ce truc là ? ça n’existe pas chez nous. Donc, aller au labo, faire la queue, se faire tirer une demi-pinte de sang à la saignée du coude – bien bleue, la saignée du coude, au bout de 4-5 trous – puis attendre 3 à 4 heures, téléphoner pour avoir les résultats. La routine, quoi…

On me dit – le toubib à qui j’en ai parlé m’a dit : « c’est politique, les labos blahblahblah.. » ;  on me dit – la laborantine à qui j’en ai parlé m’a dit : « les labos ne veulent surtout pas de ça, c’est du bon pain pour eux tous ces gens qui viennent se faire trouer la saignée du coude ».

On m’a dit – un vieux retraité depuis 15 ans sous anti-coagulants m’a dit : « il faut aller au labo tous les 15 jours… moi je peux pas y aller à pied, alors il faut appeler l’ambulance… mais pas de chance, il n’y a jamais d’ambulance « assis » disponible, alors on me trimballe jusqu’au labo en ambulance « couché », et je m’assieds à côté du chauffeur… ça doit coûter un max, tout ça ».

Eh oui, faites les comptes, les labos, les ambulances… bon, vous avez compris le film ? comme les diabétiques, qui sont maintenant et heureusement plus autonomes, les centaines de milliers de gens qui sont sous anti-coagulants pourraient se faire leur petit test INR tout seuls chez eux, comme des grands, ou à la rigueur chez un voisin, chez le toubib du coin, ça coûterait bien moins cher, ce serait bien plus pratique… meuuh non, enfin, nous avons une médecine DE POINTE, nous, en France.

Allez, faites passer, parlez-en à vos copains, ça finira peut-être par faire bouger les lignes…

Tibert

Le permis à joints (*)

J’ai une idée. Non que ça m’arrive si rarement, je vous vois déjà ricaner… non, une idée, une vraie. Une de celles qui font avancer l’humanité, genre la marmite de Denis Papin, la pomme de Newton, la côte d’Adam.

Je vous explique : bon, la délinquance, nous dit-on, « a baissé » d’un pouïème de chouïa, selon not’ Ministre, mais nous savons tous que c’est totalement bidon, tant les « petits délits » qui nous pourrissent la vie (bagnoles vandalisées, fracturées pour 2 CD, un jeton de supermarché et un carambar ; vols à la portière, à la roulotte, à l’arraché, à la tire (j’en oublie ?) ; vols de bicyclettes, de scooters, de mobiles  ; siphonnages de réservoirs ; cambriolages divers et variés) sont peu suivis, quand ils sont seulement consignés sur les registres des commissariats ! mais non, c’est pas la peine de porter plainte, on va vous faire un papier pour l’assurance.

Et je ne vous dis rien de la Justice, qui rame dans une mer de : 1° dossiers jusqu’au plafond et retard abyssal – 2° les prisons sont ras la gueule, à moins de 2 ans de punition y a pas de place libre en tôle, cassez-vous et faites-vous oublier – 3°  la victime ? bon OK la victime mais l’agresseur, le « pôvre », il faut le comprendre, il a eu une enfance difficile, il galère.

Mais il y a UN truc qui fonctionne bien, chez nous en matière de sécurité – enfin, plutôt bien – et que le Monde nous envie : les radars et les prunes avec double peine incorporée. La sécurité routière ! 2 km/h comme 35 km/h au dessus de la vitesse nominale, et c’est dans le tuyau, ça ne fait pas un pli : 90 euros ET (double peine) X points de permis en moins. Et ça marche ! ça marche même très bien, les radars d’aujourd’hui payent les radars de demain, c’est la radarisation de l’Hexagone par répartition.

Bon, vous voyez où je veux en venir ? le « petit » délinquant qui deale du shit, qui arrache les sacs à main, qui fracture les bagnoles, qui pickpockette… au lieu que monsieur le juge lui fasse les gros yeux et lui dise, paternel : allons, encore vous…  c’est très très vilain ce que vous avez fait, ça fait N fois que je vous le dis, bon, filez mais qu’on ne vous y reprenne plus ; au lieu d’une engueulade et d’un rappel à la Loi : 90 euros et 3 points de permis en moins.

Bon, les 90 euros, je ne suis pas sûr que le centre des prunes de Rennes en verra la couleur… mais le permis, alors ça le permis, ça fait mal, c’est dissuasif. Ne plus pouvoir sortir la Benz, la BMW, fruits du dur labeur de deal, pour frimer et draguer les meufs, c’est rédhibitoire.

Et s’il n’a pas le permis, le « petit » délinquant ? justement, on le lui fera passer en heures de Travail d’Intérêt Général, pour pouvoir les lui sabrer, ses points. Pédagogie ET répression,  le top.

Bébert

(*) En fait, mon titre était « Le permis à pjoints », mais impossible de barrer un caractère du titre. Tant pis pour l’astuce.

Fallait pas faire comme ça

Des trois comiques involontaires auto-proclamées « agences de notation », la plus ceci, la plus cela, la plus libéralo-libérale, j’ai nommé Standard & Poors, alias S&P, nous régale de ses remontrances et de ses bons conseils, après avoir – selon le scénario prévu, réglé comme du papier à musique, c’était écrit, il fallait le faire, pour le plus grand profit de la Finance Internationale, de la City et des Produits Dérivés – après avoir, donc, balancé sa célèbre équation AAA – A = AA.

Ahhhh… enfin, nous y voilà. Bon, et alors ? et maintenant ? hein? on fait quoi ?

Eh bien, c’est pourtant simple, il suffit d’apprendre… ils savent comment faire, eux chez S&P, et tel Moïse sur le Mont de Piété, écoutons et notons sur les Tables de la Loi S&P ce qu’il aurait fallu que nous fissions. D’autres oracles du même acabit nous donnent, et toujours après coup, de sages conseils, de bons préceptes : JP Morgan, un des fleurons de la Planète Finance, presque aussi éthique que Goldman Sachs, la banque qui vend à ses clients des produits dont elle  sait qu’ils sont pourris, la banque éthique que plus éthique qu’elle tu meurs, qui aidait la Grèce à maquiller ses budgets pourris.

Versons, au passage, une larme sur la défunte Lehman Brothers, qui n’aurait pas détonné au milieu de tout ce beau linge, mais n’a pas survécu à la crise des « subprimes » – en revanche, les agences de notation qui décernaient du AAA+ à Lehman Brothers, elles, paradent toujours et nous donnent de sages conseils de bonne gestion.

Bon, soyons pratiques et tirons les leçons de tout ça : virons ces ministres et ministresses incapables qui gouvernent nos finances, qui prennent les mauvaises décisions. Embauchons tout de suite et sans tarder quelques uns des ténors de S&P, de Moodys, de Fitch, de ces gars qui savent, eux, comment ça se gouverne, la finance, merde quoi. C’est vrai, enfin, ils savent comment il faut gouverner, suffit de suivre. C’est simple.

Evidemment, si c’était pour nous vendre, tel Goldman Sachs, et à l’insu de leur plein gré, des produits pourris dont ils savent qu’ils sont pourris, ça ne serait pas du jeu ; mais ils sont francs du collier, c’est probable. Que ces gens-là, usant de leur aura indue, claironnent partout « tel pays est dans la merde« , précisément afin de l’y mettre, dans la merde, rien de plus éthique, pas vrai ? c’est de bonne guerre anti-Euro.

Tibert

PS : J’ai hésité à intituler ce billet « Le dégradeur fou a encore frappé« . J’apprends que S&P, devenu dingue, ivre de son pouvoir de dégradation, dégrade urbi et orbi, la SNCF, EDF… toutes entreprises nationales. Les entreprises publiques, on dirait qu’il n’aime pas ça, S&P.

Aux tonnes (G. Appeaux linaires)

C’est un fait : l’orthographe fout le camp. L’orthographe, et la grammaire, et le passé simple, pour ne rien dire de l’imparfait du subjonctif. Plus il est simple et rapide de corriger un texte – un ordinateur à deux balles, un coup de traitement de texte, efficace et peu coûteux – plus il est courant de nos jours de trouver des coquilles, des fautes d’accord, des barbarismes, des à-peu-près, bref, des erreurs, dans les journaux et les livres.
Pire, on réécrit les livres pour la jeunesse – le « Club des cinq »… –  qui utilisaient logiquement le passé simple – le temps du récit, au présent : c’est plus facile, encore qu’avec ces putains de verbes du 2ème et 3ème groupe ça soye pas de la tarte. Il faut se mettre  à leur niveau, ces chers petits. Nous-mêmes, de notre temps, devions probablement ne rien comprendre à ce que nous lisions : le passé simple, fi donc, quel obscur charabia.

Bon, en matière de fautes d’orthographe, l’erreur est humaine, et personne n’est à l’abri d’une étourderie, même pas moi. Mais la relecture n’est pas pour les chiens, que je sache. Qu’on ne relise pas les quotidiens, ou à peine, ça peut à la rigueur se pardonner, le lendemain c’est oublié. Encore faudrait-il exiger des journaleux un niveau plus que moyen. Mais un livre, zut quoi ! un livre c’est pérenne, ça passe de main en main, c’est une balise.

Le « Que choisir » de ce mois-ci m’a fait hurler de rire, traitant de cette nouvelle tendance très moche des éditeurs à ne plus relire sérieusement leurs ouvrages (*). Il s’agit d’un opus de Stéphane Hessel, édité au Seuil en 2006, intitulé « Ô ma mémoire« . Dans ce texte que je n’ai pas lu, monsieur Hessel, l’indignateur professionnel, doit probablement citer des poèmes qui lui sont resté gravés en mémoire, justement, des vers qui nous parlent aussi, que nous avons aimés, que nous aimons  – tenez, Guillaume Apollinaire, « Automne » :

Dans le brouillard s’en vont un paysan cagneux
Et son bœuf lentement dans le brouillard d’automne
Qui cache les hameaux pauvres et vergogneux

Monsieur Hessel cite donc ce poème, et ça donne aux éditions du Seuil, 2006 :

Dans le brouillard s’en vont un paysan khagneux…

Non mais, rassurez-moi, ils l’ont fait exprès ? c’est de l’humour ?

Thibaire

(*) Si la relecture pouvait se sous-traiter en Chine, au Pakistan, en Malaisie, payée 3 Carambars et un coup de pied au derrière, alors évidemment, ça pourrait se faire. Mais que voulez-vous, on ne sait pas encore délocaliser ça.

It is monday, it is ravioli (*)

Je ne vous écrirai rien sur la joulie idée démago d’Eva Joly qui veut donner des jours de congés en rab’ aux Sikhs, Shintoïstes, Boudhistes… et j’en oublie. C’est la période des cadeaux Bonux, profitez-en, il devrait y en avoir pour tout le monde.

Je ne vais pas vitupérer le « IT For Business Forum » qui va se tenir à Deauville à grand renfort d’anglicismes tous les 3 mots, speakers, time to market, best practice et success stories, trend… et j’en oublie. Il ressort clairement de tout ça que pour faire des affaires il faut être anglo-quelque chose, nous autres pauvres cons de latins n’y entravons que couic, le français est infoutu de vendre quelque chose en français – même à des Français, et, fi donc, débattre en français en France est du dernier plouc.

Je vais vous écrire quelque chose sur un nouveau truc super, ça vient de sortir :  pour produire des films français qui marchent bien à l’international, il faut les produire en langue anglaise ! eh oui, c’est tout con, si « Trois hommes et un couffin » avait été parlé en Rosbif – Dussolier Boujenah et Giraud doivent bien pouvoir baragouiner ça, sinon on les double, pas de problème, ou alors on prend Pitt Cruise et Clooney… – il est clair que c’était le succès planétaire garanti ! pas besoin de faire du doublage laborieux pour les Etats-Uniens et autres anglophones, pas besoin d’en faire une pâle réécriture hoolywoodienne : que du bon !

Donc : les cours d’art dramatique, les cours Simon, Florent… les écoles d’acteurs : mettez-vous à l’anglais, que diable. Les acteurs : tâchez d’améliorer votre « The » (pas « ze », merde quoi, « the » avec la langue qui pointe sous les incisives supérieures, oui c’est dur…) et s’il faut des versions pour le marché « domestique » (intérieur, en français) on doublera, tant pis… tiens, il paraît que les intellos détestent les films doublés : on leur mettra des sous-titres,  no problem !

Tibert le Latin

(*) T’as d ‘ beaux yeux, tu sais…

Vite fait mal fait

Je raillais (non, je ne ralliais pas, je raillais) il y a quelques jours les sondages donnant les Français comme très majoritairement contre la mise en place d’une TVA « sociale », mais sans y comprendre grand-chose. « J’y pige que dalle mais je suis contre« .

Ceci ne signifie pas pour autant, chers auditeurs, que je suis favorable à une telle réforme, et je vais même vous avouer un truc : je ne suis pas un inconditionnel de Nicolas S., bien que lui, de son côté, soit carrément « accro » à mon blog et se précipite tous les matins pour voir si j’ai pondu un nouveau billet. Je vais donc en profiter avec opportunisme pour lui suggérer des pistes de réflexions.

D’abord ce constat constant, et c’est triste : la France souffre de bipolarisation chronique exacerbée droite-gauche ; restes des « oppositions de classes », vieilles lunes du défunt Marxisme acclimaté au pays du camembert, façon Georges Marchais. Pas moyen, dans ce foutu pays, de trouver des gens capables de pratiquer le dialogue, la confrontation constructive des idées et la synthèse. C’est véritablement une tare chez nous, et qui nous coûte très cher. On a donc une droite (pour le moment) aux affaires et qui tâche de faire passer ses « réformes » au forceps, et une gauche (pour le moment) en résistance et qui s’arc-boute contre, quoi que ça puisse être : c’est con, bilatéralement con. Et ça donne des résultats stupides, d’autant plus que le Grand Chef est du genre à dégainer trop vite, quitte à faire machine arrière ensuite.

– La proposition de taxe « Tobin » sur les transactions financières, limitée au périmètre français, telle que soutenue par N.S., est une ânerie : tout le monde le sait et le dit, ça va faire fuir aussi sec les opérateurs boursiers vers d’autres cieux où ça restera gratuit. Résultat pitoyable et prévisible : la Bourse de Paris à la ramasse. C’est évident, il faut obtenir au minimum un consensus de la zone Euro sur ce point pour que ça ait une chance de fonctionner sans se tirer / nous tirer une balle dans le pied.

– La TVA sociale est un chantier qui mérite qu’on ne le bâcle pas « avant les élections », qu’on prenne le temps de la réflexion, de la concertation, des arbitrages équilibrés. Pour le moment c’est une réforme à la hussarde, une de plus, et on en dit n’importe quoi. Tiens, le Monde aussi y va de ses affirmations  fantaisistes : « Les retraites du régime général et de la fonction publique sont indexées sur les prix. Au 1er janvier, elles sont ainsi augmentées… » : c’est n’importe quoi. C’est en avril dernier que les retraites ont été réévaluées, et tout le monde peut constater que ce n’est pas au niveau du taux de l’inflation, loin s’en faut. Le journaleux qui a commis ça constatera plus tard la triste réalité, quand il sera à la retraite… bref, la TVA sociale avant le mois de Mai ? téméraire, aventureux et contre-productif.

Bien évidemment, j’entends d’ici N.S. me rétorquer : non mais, Tibert, t’as vu à qui j’ai affaire ? comment ça fonctionne ? pas moyen d’avancer ! quoi que je dise, en face c’est non, non et non. Comment veux-tu que je discute de manière constructive et avec qui ? je propose quelque chose, ça déclenche illico les injures, l’anathème, le refus.

C’est vrai, aussi, quoi  : il ouvre la bouche, aussi sec l’écho renvoie « Fouquet’s », « Bolloré », « Rolex » (*)…. c’est lassant, à la fin.

Tibert, sévère mais compatissant

(*) Honnêtement, je sais pas pourquoi on en fait un drame, de cette histoire de Rolex : moi je peux en acheter une pas cher du tout. Quasiment tous les jours je reçois par email des offres avantageuses : jusqu’à 90 % de ristourne et plus. C’est pas si bling-bling que ça, la Rolex.

Libres livres

Les frontières de l’aube s’annonçant à l’horizon de Serangoon Gardens ou de Barbera, les petits-oiseaux commençant leur « boeuf » sur les branches, je suis là vissé devant ma page blanche, et ma foi la candidature éventuelle d’un ancien footballeur ombrageux et un peu foutraque aux Présidentielles 2012 ne m’inspire pas. Je vais donc vous entretenir – mais non, je ne vais pas vous entretenir ! vous rigolez, ou quoi ? – mais je vais vous entretenir d’autre chose.

Le livre électronique, j’en ai rêvé, ils l’ont fait. Techniquement c’est nickel, même si ça ne remplace pas les bonnes vieilles pages qu’on corne au coin pour marquer la page. Mais dix bouquins à 500 grammes chacun ça fait 5 kilos, et oui c’est lourd. Donc, vive le livre électronique ! en plus du papier, évidemment.

Mais voilà, moi je les emprunte, je les prête, je les revends, je les achète d’occasion, plus rarement neufs, ces chers livres : un livre ça vit, ça passe de main en main si ça vaut le coup, et puis un jour ça finit au pilon, à la poubelle ou sur une étagère à la maison ou chez un broc’, pour 2 euros – jamais 1,99, ça c’est du prix markétingue et baise-couillon, pas du prix de broc’.

Il existe même des médiathèques : je m’y inscris pour une poignée de sequins ou même gratoche, et je puis y emprunter plein de belles choses sans payer : le poids d’un livre quasiment gratuit, vous voyez, c’est bien moins pesant. Mais ça reste lourd, hélas, dans le sac, au bout du bras.

Donc, vive la légèreté, et vive le livre électronique – tiens, j’achète chez Anna-Zaune  « Les trois moustiquaires », d’Alexandre Dumât, et ça me coûte 2/3, disons, du prix du papier en édition de poche… voilà, je paye et je télécharge ce bouquin, il est « à moi »,  je le lis ou pas, c’est selon… mais…

– je voudrais prêter mon livre (et pas mon lecteur électronique, nuance !) à ma copine Aglaé, à mon cousin Jules : impossible, ça ne se fait pas. Il faut que je prête mon lecteur avec. Pourtant j’accepte que, prêtant mon livre, il soit pendant ce temps indisponible sur mon lecteur… ça doit coller, non ? non. D’autant plus qu’il y a des formats incompatibles entre lecteurs. Donc en somme, ça ne se prête pas, c’est comme les brosses à dents !

– bof, les histoires de moustiquaires, ça me lasse, alors ayant lu 36 pages  j’abandonne, je veux donc le revendre : ça ne se fait pas, eh non, il n’existe pas de marché d’occasion pour le livre électronique. Vous trouvez ça normal, vous ? si ça m’a coûté 1,20 ou 1,50 unités monétaires, je peux l’admettre – un « droit de lecture », en somme – mais si c’est 7 ou  8 ou  10 unités, alors là, zut, c’est abusif.

– il est extra, ce bouquin, mais il bouffe de la place sur mon lecteur : il faut que je le sauvegarde avant de l’effacer pour libérer de l’espace… mais comment le sauvegarder en étant certain que dans 2 ans, 5 ans… je pourrai le relire ? c’est-à-dire le remettre sur mon lecteur – mon prochain lecteur, car bien évidemment entretemps j’aurai acheté le dernier machin extra-plat à lecture relief et gloutron périonique  – sans me heurter à des problèmes d’incompatibilité ?

– je suis inscrit à la médiathèque de Noeud-en-Brie : comment vont-ils, à la médiathèque, me « prêter » des livres électroniques ? en papier c’est gratuit, d’accord, alors en électronique c’est combien ? et comment fait-on en toute légalité ?

Voilà, c’est très très bien le livre électronique. Enfin, ce sera très très bien, quand on aura répondu correctement à mes questions.

Bébert