Hypertrophie digitale

Je lis ça : « «Les plats préparés, les télécommandes et même les courses sur internet contribuent à faire du Royaume-Uni un pays dangereusement paresseux et oisif» .

Bon, c’est Libé-sur-Toile qui le cite… j’ai cliqué sur mon mulot, gardant l’index droit appuyé pour mettre en surbrillance, dans l’article dont je vous entretiens, la phrase sus-citée, puis, ayant effectué un élégant appui simultané de l’auriculaire et de l’index gauche sur les touches « CTRL » et « C », j’ai re-cliqué de l’index droit – encore lui – sur l’onglet idoine de mon navigateur de Toile (« Renard de feu », pour les intimes), repéré l’endroit ad hoc pour y insérer ma citation, re-clic, puis d’un nouvel appui simultané du couple infernal annulaire-index gauches sur les touches « CTRL » et « V », y ai déposé ladite phrase, et en italiques, allez hop, c’est la fête.

Vous noterez que sur les télécommandes – de volets roulants, de portes de garage, de télés, de… – bref, vous noterez que c’est le pouce droit qui s’y colle. On bosse énormément, mais du pouce droit. Foin de couple annulaire-index gauches, point d’index droit, non, c’est le pouce. Droit.

Tout ça pour dire que l’article de Libé est terriblement partial. Certes, les Britanniques bouffent des plats préparés, pizzas, sandwiches, fish’n’chips, jacked potatoes – j’ai même vu de ces « patates fourrées » (*) garnies de haricots blancs en sauce tomate, si si, ils osent ce genre de truc -, certes ils font leurs courses en 327 clics de souris, et télécommandent un tas de trucs sans bouger le cul du fond de leur canapé, mais qu’est-ce qu’ils ont les doigts robustes ! et déliés, et fermes, et rapides. Surtout l’index droit, le pouce droit, et le couple annulaire-index gauches. Et inversez droite-gauche pour les gauchers, les left-handed, bien entendu.

Tibert

(*) Recette de la jacked potato : une grosse patate oblongue genre bintje, cuite à l’eau en « robe des champs » ((jacket potato avec un t, pas un d : patate en jaquette, ou en robe des champs, ou de chambre, c’est égal), coupée en deux par un plan médian – et un couteau, bien évidemment – ; on en évide quelque peu les deux moitiés à l’aide d’une cuillère (on ignore ce que devient la chair de patate ainsi éliminée, les recettes n’en disent rien), puis on garnit les cavités ainsi constituées de diverses choses, viande hachée, miettes de thon, fromage râpé, sauce… bref ce qui vous chante, et hop, c’est prêt ! On peut aussi la passer brièvement au four pour y réchauffer la garniture. Avouez que fourrée de haricots blancs en sauce tomate, ce doit être une fameuse patate, légère, pas bourrative du tout. Et équilibrée, avec ça !