Vieilles traditions vides de sens

Un article du Monde mérite, amies-et-amis lectrices-et-lecteurs (pff… le langage politicien, quel boulet), mérite, dis-je, et amplement, que vous y jetiez un cil, c’est très instructif. Il s’agit d’un commentaire « sociologique » sur les chiffres annuels des bagnoles cramées au Nouvel An. Shakespeare a soufflé le titre : « Voitures brûlées à la Saint-Sylvestre : beaucoup de bruit pour rien« .

L’éphémère doublure de monsieur Cazeneuve à l’Intérieur, monsieur Le Roux, qui apprend vite, a évidemment minimisé les chiffres, « meuhhh non c’est pas grave »  : l’astuce, c’est de compter non pas les voitures brûlées comme on faisait bêtement avant, mais les « départs directs de feu » : quand un cocktail-Molotov fout le feu à trois bagnoles alignées, c’est UN départ de feu ! et non pas trois bagnoles cramées. Alors comme ça, on obtient « seulement » + 8% de résultats, pas si mal… encourageant… etc. Bref y a pas de souci, tout est calme, il faut bien que les jeunes se divertissent, faut comprendre. La France, notez bien, est le seul pays qui puisse se targuer de cette sympathique tradition née à Strasbourg, vieille de 30 ans, et solidement ancrée depuis dans nos coutumes, au même titre que la Braderie de Lille – abandonnée l’an dernier pour des raisons qui sortent du cadre de ce billet – le Salon de l’Agriculture ou le Grand Pardon de Sainte-Anne d’Auray.

Moi je sais pas, mais si j’étais Ministre de L’Intérieur je viendrais sur le plateau  de TF2 ou de BF1 pousser une grosse gueulante pas du tout diplomatique : ce sont des faits révoltants. Il existe des articles du Code Pénal là-dessus, vous pensez bien, mais leur application supposerait qu’on applique la Loi, vous  n’y pensez pas ? ça ferait de la peine aux jeunes en déshérence morale et déficit d’espoir.

Les rédacteurs de cet article du Monde vous expliquent cyniquement, leurs voitures vont bien, merci – et ils ont peut-être raison – que les statistiques annuelles de combustion non spontanée de voitures ne signifient rien en terme de barométrie (ou de thermométrie plutôt : on l’a dans le baigneur) des humeurs (sic)  des jeunes : «  Non seulement ce chiffre n’a aucun sens, mais, en plus, il ne dit plus rien de l’humeur des jeunes des quartiers populaires ».

Ce chiffre ne dit plus rien : à quoi bon le sortir, donc ? et puis bof, les assurances rembourseront, et puis ça rajeunit le parc automobile, et puis ça égaie nos moroses banlieues, et puis dans le tas il y a sûrement des fraudeurs à l’assurance, et puis ce n’est pas ma caisse qui a morflé, et puis tenez Place Beauvau aucune voiture n’a été brûlée, et puis y a qu’à rentrer sa voiture à l’abri le 31 décembre. Et puis à quoi bon des articles de loi ? je vous le demande, autant pisser dans un violon.

Tibert

2 thoughts on “Vieilles traditions vides de sens”

  1. … C’est con tout ça, parce qu’il y a une solution fort simple à propos de laquelle je m’étonne que notre chère Mini-stress de l’environnement, jamais en retard d’une royale bécasserie, n’ait pas encore attiré l’attention des pouvoirs idoines ( « … Et qu’est-ce que les douanes viennent faire là dedans ??? », comme elle ne manquerait pas de le souligner à coup sûr. Mais passons.) : remplacer les automobiles, matériau hautement inflammables (sauf les admirables SAAB, hélas défuntes pour cause d’excès de concupiscence chinoise…) par des vélos, nettement moins sujets à la combustion plus ou moins spontanée ; moins polluants aussi ; moins chers ; excellents pour la santé de par l’exercice qu’ils procurent etc. etc… Et pis des autoroutes à vélos ce serait, en outre, nettement moins dispendieux que celles dont l’Etat fait généreusement cadeaux à des Stés d’exploitation (c’est bien le mot !) privées une fois qu’elles devraient – en principe – être amorties par des décennies de péage, et donc gratuites. Du coup, on reverrait fleurir les superbes équipages en tandem des familles nombreuses des premiers congé-pés et du Front Popu !
    Quant au ferroutage à vélo, je n’en parle même pas pour l’avoir longtemps pratiqué lorsque je bossais à Schtrossbourry* et que j’habitais Overnââ… J’en utilisais même deux les grands jours : un pour aller de chez moâ à la gare d’Obernai, où je l’abandonnais à la consigne et un autre pour aller de celle de Strasbourg à l’institut de Bota, rue Goethe. Et bien que nous fussions dans la ville où cette charmante coutume de la crémation automobile rituelle a vu le jour, je n’ai jamais eu à déplorer aucune de mes deux bécanes incendiée.
    Caisse vous dites de ça, chère Ségrolaine (vierge ?)…

    * Schtrossbourry et Overnâ sont les patronymes alsaciens de ces deux villes, que j’adore avec Prague et Florence !

    1. Prague me botte fort itou, et la Pilsner Urquell de même, surtout à la pression.
      Ceci dit (ici un jeu de mots…) vous savez sûrement que de la Plaine d’Alsace vers l’Ouest se dresse le massif vosgien. Vous y montez souvent à vélo, pour aller bosser ? acheter le journal ?
      Et dites-vous bien que s’il n’y avait que des vélos à se mettre sous le cocktail incendiaire, « ils » se rabattraient sur les vélos. Question de principe, de faire ch… un maximum.

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