De l’opportunité de se taire

Je reviens sur le bouquin écrit par deux journaleux et qui vient de paraître, « Un président ne devrait pas dire ça« . Là-dedans il y a des informations carrément détonantes, décoiffantes : Normal-1er y déclare – c’est du moins ce que rapportent les deux écrivaillons – qu’il a ordonné 4 (quatre) « homo »  (pas des gays, non non, mais, en jargon du métier, des exécutions ciblées, c’est-à-dire la mise discrète et définitive hors d’état de nuire d’individus connus pour leur dangerosité et qu’il serait vain, voire contre-productif de capturer, trimballer, emprisonner, juger, punir etc.

Je rejoins – c’est là un des rares points où je suis d’accord avec lui – le jugement lapidaire et précis de monsieur Ayrault, l’actuel Ministre des Affaires Etrangères : « «Un président ne devrait pas dire ça… la réponse est dans le titre« . Bien dit. Mais monsieur Ayrault poursuit : « C’est la seule chose intéressante du livre« . Et là je dis non, il y a plein d’autres trucs intéressants, eux, et utiles à connaître.

Quant à cette information même, les gens sensés ne vont pas lever les yeux au ciel en poussant des exclamations horrifiées : ça se fait, ça s’est toujours fait, ces choses là, et c’est très bien ainsi, quand c’est pour le bien de notre pays. Mais non, dix fois non, ça ne se dit pas. Et là les journalistes ont commis une faute lourde, ou alors sérieusement merdé : ils le savent très bien, eux, que ça ne se dit pas.

Tibert

Hara qui rit froid

Je voudrais aujourd’hui, chers auditeurs, faire ici un peu de politicaillerie, glosant sur les productions littéraires de la semaine dernière – sur l’une d’elles en fait – le désormais fameux bouquin intitulé Un président ne devrait pas dire ça… (les secrets d’un quinquennat). Bien plus fort que le « Casse-toi pov’ con » qui fit hurler les vierges effarouchées – bien sûr qu’un président doit s’abstenir de dire ça… – voici les aphorismes façon Normal, on pourrait presque dire Normaliens.

D’abord, il est écrit sur la page de titre, et je recopie servilement, « président », pas « Président ». Un président normal, donc, pas un Président-Majuscule. Et puis il est question d’ UN quinquennat, pas deux… voilà qui est clair, non ? ça ne vous éclaire pas ? alors enfonçons le clou, c’est là où je veux vous amener, c’est la pierre de touche de mon propos : Normal-Président nous livre là son « Salut les gars« , « Ciao ragazzi« , « See you » etc. S’il avait estimé avoir l’ombre d’une chance de rempiler victorieusement pour un deuxième mandat, évidemment qu’il aurait mis le holà à la publication de ses croustillants, cyniques, lucides, désabusés, consternants… commentaires sur la vie politique de ces quatre années écoulées. Il sait blaguer à froid, Normal, et – j’ai déjà eu l’occasion de vous le confier – j’apprécie chez lui cette forme d’humour, que je pratique moi-même plus modestement. Mais là si blague à froid il y a, c’est très très fort, et je lui tire mon chapeau : personne n’a l’air d’apprécier, ce qui est le fin du fin pour le blagueur à froid, le private joke du feu de dieu.

Voilà… ceci est une des pièces de son testament, apocryphe évidemment puisqu’il ne l’a point rédigé lui-même, mais avec son imprimatur, ça c’est sûr. Et que cela consterne dans son camp – son camp-panier de crabes, où des tas d’ingrats jusqu’auboutistes lui ont savonné la planche alors qu’ils lui doivent leur bifteck – me réjouit profondément. C’est un joli pavé dans le marigot que Normal nous lègue là. Cynique ? certes, contestable, oui bien sûr, mais dépouillé de toute langue de bois, et ma foi, rafraîchissant.

Tibert, in petto épaté