30, 31, 32, 33…

On connaissait les éboueurs de Marseille : « fini-parti », c’était la règle ; donc Fangio était au volant des camions-poubelles ; les gars devaient concilier deux exigences nettement contradictoires, nettoyer les rues au mieux, et puis finir le plus tôt possible pour aller faire autre chose de plus motivant. On a la même situation ou similaire à Paris : certains employés municipaux (fonctionnaires territoriaux, donc…) ont des conditions « aux petits oignons », notamment les horaires. Il me souvient – c’est vieux ! – qu’ayant un travail à faire à la Mairie de Paris, au mois de juin, dans le grand immeuble du boulevard Morland,  je pouvais voir dans les bureaux d’en face ces dames s’adonnant de longues heures à des travaux d’aiguilles, cependant que dans les bureaux voisins on bossait activement, brêmes en mains, la Majeure Cinquième et l’entame assassine. Ce n’était pas le « fini-parti », non plus que les 35 heures grand maximum, mais on meublait efficacement le temps libre ! encore n’y avait-il pas le Houèbe, Youyout’Entube, etc, portes ouvertes vers d’autres horizons…

Bref, à Paris, le musée Carnavalet devait rouvrir, hier samedi 29 mai 2021, après une longue glaciation covidaire… délicieux petit musée du Marais, enfin visible ! Je cite Le Monde : « L’entrée du plus ancien musée de la capitale, situé au cœur du Marais, a été bloquée par des agents de la Ville de Paris travaillant dans l’établissement, en grève pour des questions portant sur le temps de travail. Le musée a été contraint de fermer toute la journée de samedi, pour laquelle tous les créneaux de réservation étaient remplis. » En clair, « des agents de la Ville de Paris » n’ont aucune envie de travailler 35 heures par semaine, comme on le leur demande maintenant pour d’évidentes et justes raisons d’égalité devant le travail, quand ils en font actuellement nettement moins, avec la bénédiction des édiles. Ce qui rejoint la boutade – de monsieur Strauss-Kahn, je crois – lors de l’instauration triomphale et hautement symbolique des glorieuses 35 heures par madame Aubry : « Il faudra y aller progressivement… 31, 32, 33… ».

Voilààà… cela pose évidemment un autre problème, celui du clientélisme de nos élus, ici les municipalités. On embauche, on embauche, des tas d’agents municipaux qui seront autant de relais favorables, le moment venu de se faire réélire. Peu importe qu’ils n’aient aucun boulot réel et sérieux à tomber, que ça coûte un max aux citoyens, que les DRH ne sachent pas trop comment maquiller tout ça en emplois crédibles et justifiés. Et c’est comme ça que nous avons des armées de fonctionnaires, quand – hormis les missions régaliennes, évidemment : police justice impôts etc – n’importe quel salarié sérieux, compétent et honnête pourrait parfaitement s’y coller. Survivance du soviétisme cher au PCF des années d’après-guerre, modèle sociétal concrétisé dans l’éphémère RDA – 44 ans d’existence, tout de même – et qui a permis la création de l’ineffable Trabant, qui fumait bleu.

Tibert