Je vous l’avais annoncé, nous revenons sur cette histoire de recrutement parallèle à l’Ecole Nationale d’Administration, en bref l’ENA. Il faut savoir que c’est un truc à tiroirs, ou, pour enfiler la métaphore balistique, une fusée à 2, voire 3 étages. Le système le plus évident, on le sait, c’est de se taper le cursus de Sciences-Po(litiques), à Paris de préférence, ou ailleurs à la rigueur, puis passer classiquement le concours d’entrée de l’ENA . Avec du pot, du talent, de solides bases, du vernis, ou toute combinaison de ces ingrédients, ça peut passer.
Comme l’ENA c’est bigrement tentant, on a goupillé pour les candidats très motivés une fusée à 2 étages : une école de l’école, ou la “prépa” à l’ENA. Spécialisation pointue. Evidemment, il y a sélection des candidats à la candidature, les “prépas” de l’ENA ne sont pas pour tout le monde : à l’ENA, le savoir et la performance cérébrale d’une fac’ de médecine ou d’une quelconque Polytechnique ne suffisent pas ; il y faut du savoir et de la performance cérébrale PLUS (et surtout) de la culture, du brillant, du pep’s, l’oeil qui pétille ! pour diriger la France, il faut ça. Et pour permettre à ceux qui, méritants, cérébralement performants mais “issus de milieux défavorisés” – c’est la formule déposée, bien lisse, même le MRAP ne peut rien y redire – d’avoir leur chance, on a créé une filière spécifique : le brillant, la culture, le pep’s, l’oeil qui pétille, ça s’apprend ! ça s’apprend à Strasbourg.
Mais hélas la promotion “diversité” – c’est le nom bien lisse qu’on lui a trouvé, les 15 garçons et filles issus de milieux défavorisés de cette “prépa” strasbourgeoise se sont tous fait recaler au concours de l’ENA. Une seule élève a passé le barrage des épreuves écrites… mais calé à l’oral. Le bide ! Notons au passage que “diversité” et “issus de milieux défavorisés” ça fait sens : les candidats standard , hors diversité, ne sont donc pas issus de milieux défavorisés. Mais n’en concluez pas qu’ils sont issus de milieux favorisés – en toute logique c’est faux, même si c’est vrai. Vous suivez ?
Que faire, donc, pour introduire de la diversité dans l’administration française ? car, ne nous y trompons pas, ces 15 candidats, avec le boulet de “diversité” qu’ils traînent, sont certainement très performants, pointus… mais voilà, ils n’entrent pas dans le moule… ou le moule ne leur va pas.
Quatre solutions sont possibles :
– on ne change rien ! zut quoi, l’ENA c’est pour l’élite, et l’élite ça ne se brade pas. L’usine à gaz, avec du vernis dessus… la classe !
– on adapte le concours de l’ENA aux candidats “issus de milieux défavorisés”. Formule qui a fait ses preuves pour le bac’, puisque 80 % minimum d’une classe d’âge réussit maintenant le bac’ – qui ne vaut plus un pet de lapin, et du coup on a repoussé le barrage un peu plus loin.
– on simplifie l’Administration française, ce qui, ipso facto, diminuera la difficulté à en appréhender les rouages, donc en facilitera l’approche. Bon courage, mesdames-messieurs.
– on crée une Administration “diversité”, une autre administration “issue de milieu défavorisé”, pile-poil pour les Enarques de la même eau, avec, bien évidemment, un concours adapté, et des règlements administratifs spécifiques, goupillés pour “les milieux défavorisés”: le 9-3, la Grande-Borne, tout ça. Remarquez, ça fonctionne déjà comme ça…
Tibert
(*) Vous avez sûrement reconnu là une citation de Boby Lapointe :
“Lena toi qui es loin plus loin qu’Angoulème ”
“Lena je veux te dédier un poème “…