Une histoire belge

La Belgique accapare l’actualité durablement, et la vacuité du gouvernement là-bas fait question. C’est la revanche des Flamands naguère très minoritaires et peu considérés, aujourd’hui plus nombreux, plus riches, plus jeunes, moins chômeurs ; mais la volonté de scission affichée par les plus virulents des Flamingants trouve heureusement une opposition forte et résolue chez de très nombreux Belges des deux bords, et l’on peut s’en réjouir. Personnellement j’apprécie que la Duvel, la Stella Artois et la Jupiler soient Belges plutôt que Flamandes ou Wallonnes, que le Manneken Piss pisse en Belgique et pas en France, que l’exotisme du WaterzoÏ soit à moins de deux heures de route de Paris, que ces gens nous soient si proches et si différents.
Un très intéressant article du Monde d’hier – pas obsolète pour autant, rassurez-vous – nous éclaire sur un aspect fondamental de cette querelle Flamands-Wallons : la réticence historique des francophones à apprendre et parler la langue des Flamands, alors que symétriquement ceux-là pratiquent assez bien notre langue. D’où ce dialogue grinçant : « Vous parlez français ? – Neen« . Si je puis hasarder ici un sentiment, c’est que les sons gutturaux, les râclements de gorge, les roulements de langue propres au flamand et au hollandais me semblent bien difficiles, au moins autant, sinon plus que le fameux « the » des Rosbifs que nous Grenouilles nous acharnons à prononcer « ze », incapables que nous sommes de feutrer quelque peu nos sons. Pourtant, cette expressivité débordante du flamand devrait nous aider ; l’articulation outrée des langues saxonnes, allemand, néerlandais, est largement plus « lisible » à nos oreilles que la bouillie du Rosbif, où les « r » non articulés, les « w » voisins du « r » et enrobés dans le chewing-gum, l’absence de claquement des syllabes produisent une matière sonore difficile à découper auditivement.

Bref, l’apprentissage du néerlandais ou du flamand – les Flamands n’aiment pas qu’on dise qu’ils parlent flamand, c’est en principe du néerlandais – ne semble pas enthousiasmer les Wallons, ni d’ailleurs les Français… soyons francs, on a déjà assez de mal à baragouiner l’Angliche. Un autre constat me semble clairement expliquer cette dissymétrie : voyez les invasions (je n’ai pas écrit « barbares », eh oh !) estivales de voitures badgées « NL » et « B » sur nos belles routes : si l’un de ces joyeux vacanciers vous interpellait avec un « vlaams spreken ? » ça vous défriserait, non ? Vous le prieriez de faire l’effort de causer not’ langue. Et vous auriez raison. Inversement, combien de Français envahissent les Pays-Bas et la Flandre belge pendant les vacances ? très peu, très peu ! Surtout que, les pancartes routières étant salement monolingues en Flandre, on erre lamentablement de rond-point en bretelle d’autoroute, pestant contre ce « Bergen » ou ce « Rijsel » qui ne figurent sur aucune carte.

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