La clairvoyance des bateleurs

( Je ne sais pas si vous avez jeté un cil sur les projets de réhabilitation de ND de Paris, étalés sur le Paragots ou d’autres : c’est décoiffant ! comme quoi le bon goût n’est pas chose si répandue. Une suggestion : on fait des charpentes en lamellé-collé autrement légères et aussi robustes que les troncs massifs de chêne « français » des siècles passés. Ou de l’acier… bref : on sait construire plus efficace ; et une charpente, ça ne se voit pas. Pour le reste, c’est une église, pas un hall de foire ; et puis il importe de ne pas se moquer des innombrables donateurs, qui  se sont imaginé qu’on allait rebâtir la cathédrale, pas faire un concurrent à l’Atomium ou à l’opéra de Sidney. )

Mais bon… et puis j’ai lu dans l’Hibernation le manifeste signé d’un paquet de gens du spectacle, qui, écrivent-ils, ne sont pas dupes. D’abord c’est de l’écriture inclusive, et rien que ça, ça me donne des boutons : « … artistes, technicien·ne·s, aut·eur·rice·s, de tous ces métiers de la ­culture…« . Chouette culture ! vous imaginez Binoche ou Bonnaffé débitant sur le plateau leur texte en écriture inclusive ? la culture, c’est d’abord de respecter sa langue.

Notons la docte citation en pur rosbif, en bas du manifeste, de cette fadaise émise par Feu Sir John Lennon : «A dream you dream alone is only a dream / A dream you dream together is reality.» ( je traduis à ma sauce : Rêver tout seul, ce n’est que du rêve ; rêver ensemble, c’est du réel ). Ce n’est pas faux, cher John, sauf que donner corps à des rêves collectifs n’a jamais fondé leur légitimité ou leur pertinence ! rêver n’a jamais été signe de jugeote.

Et de jugeote (*), les signataires de cet appel n’en ont pas plus que moi ou tout autre citoyen en possession d’un minimum de sens commun : le monde du spectacle n’est pas doué par nature de clairvoyance politique supérieure. Etre une actrice, un metteur en scène, un artiste… ne procure pas un supplément de Q.I. : tout au plus de la visibilité, et rien d’autre ; et c’est ça qu’ils.elles 😉 exploitent, les signataires : leur visibilité ! évidemment ça leur a permis de trouver à Libé une page accueillante, et au Monde une caisse de résonance complice, chose dont Tibert l’obscur et solitaire blogueur ne pourrait rêver.

Péroraison de cet appel du 4 mai : « Rien n’est écrit. Dessinons un monde meilleur« . Belle enflure textuelle ; enfonçons des portes grand ouvertes ! quant à nuancer le pour et le contre des révoltes en jaune – si si, il y a du pour, et du contre ! – , quant à dénoncer la violence et la haine portées par ce mouvement et les opportunistes qui s’y agglomèrent, quant à percevoir le vide, l’ineptie, le chaos des propositions sociétales, s’il y en a, pour l’après-démolition tant espérée, alors là… ce sont des gens du spectacle, faut pas pousser.

Tibert

PS – En négatif sous cet appel, amusez-vous à relever tous les noms d’artistes très connus et qui n’y figurent pas… comme quoi, hein, dire que c’est « le monde du spectacle » qui, que… non : quelques-un.e.s, inclusivement, et basta.

(*) Oui, j’ai vérifié, il n’y a qu’un t : jugeote, n.f.

8 thoughts on “La clairvoyance des bateleurs”

  1. … Ahhhh l’Atomium, puisque vous en parlez.. Ma première (et seule jusqu’à présent…) grande évasion à vélo, en 58… parce que mon chef de patrouille des Éclaireurs Unionistes (protestants…), le beau Daniel R., m’avait mis au défit de l’y accompagner… 80 km dans chaque sens dans les mollets ; avec un vélo de curé sans dérailleur, je vous dis pas l’exploit ! À me sentir des ailes pour le prochain Paris-Roubaix, à l’époque !
    Pourquoi je vous cause de ça ? Ben, parce qu’à l’origine, il était en aluminium l’Atomium ; pour la bonne et simple raison que, comme pour la Tour Eiffel, il ne devait pas survivre à l’Exposition Internationale. Et 60 ans après il est toujours là. Le parallèle avec Notre-Dame* ? C’est qu’au vu de l’humidité et autres de l’atmosphère bruxelloise, il s’est très vite dégradé au point de tourner passoire. Donc, il a fallu le refaire et le repenser en matériau de préférence inaltérable. L’or ayant été très vite mis de côté pour d’obscures raisons financières (et puis, ce mauvais goût bling-bling !), on s’est rabattu sur l’acier-inox « 18-10 », qualité marine. Ben vous me croirez si vous voulez, ce crime contre l’authenticité originelle (ou « ginale » ?) n’a rencontré aucune opposition : l’Atomium d’aujourd’hui est en acier inox, comme n’importe quelle écumoire domestique. Sauf qu’il brille plus qu’avant sans qu’on ait pour autant besoin de l’astiquer au « Miror »** tous les trois mois.
    Alors, SVP, arrêtons de nous croire encore au XIIIème siècle ! après tout, Violet-le-Duc l’a bien coiffée d’une flèche qu’avait rien d’authentique la Notre-Dame (pour ne rien dire des gargouilles tout à fait païennes dont il l’a accablée) et à l’époque, personne n’a trouvé à redire, que je sache… et puis ce sera l’occasion de faire démonstration de nos capacités techniques contemporaines : par exemple – et sans la défigurer pour autant ! – une charpente métallique en « aile de cygne » en métal contemporain (pas forcément en fer repeint orange-minium), d’une seule volée et sans point d’appui comme notre beau Pavillon de l’Expo de 58, justement… les idées de matériau + ou – composites pour la recouvrir ne manquent pas pour remplacer le plomb : c’est une cathédrale, pas un abri anti-atomique ! Alors, un peu de bons sens, je vous prie !
    T.O.

    (*) La « Notre-Dame » de Bruxelles ; là où on couronne le Roi des Belges, elle s’appelle « Sainte Gudule »… Défense de pouffer.
    (**) Marque déposée. Et je peux en parler d’autant mieux que ma mômon chérie était une fana des cuivres blinquants et que, là où les copains se faisaient de l’argent de poche en poussant des tondeuses-à-zagon (pas encore pétaradantes et puantes et moins encore « autoportées »), moi, j’astiquais les cuivres. Toute une époque !

    1. Ah bon ? la Tour Eiffel serait en aluminium ? on nous l’aurait caché ?
      Mais bon… pour ND, des charpentes modernes et de notre siècle, évidemment ! audacieuses, pourquoi pas ? supprimer la flèche ? c’est à envisager. Des soufflés chantilly et des biroutes illuminées, non.

  2. … Allons-allons Tibuche, ne faites pas l’âne ! J’ai dit que, comme pour la Tour Eiffel – laquelle, en principe, ne devait pas survivre à l’expo universelle de 1889 -, l’Atomium ne devait pas subsister après l’Expo de 1958. Total, l’une et l’autre sont toujours là ! Et si la Tour Eiffel n’est pas en alu, c’est tout simplement que la découverte de l’élaboration de l’alu à partir de la bauxite était encore trop récente… et que surtout, on ne disposait pas des quantités d’électricité considérables nécessaire à son élaboration ! Au point que l’alu fut un temps considéré comme un métal précieux, ce qui sauva la vie de Napoléon III arrivant à l’Opéra lors de l’attentat d’Orsini en janvier 1858 : contrairement à ce que l’on prétend parfois – des plaques de fer en sandwich dans les portières – c’est parce que la structure intégrale du carrosse, en particulier le plancher, était en alu coulé – métal tout nouveau à l ‘époque et très résistant à la perforation sous cette forme – que l’Empereur et l’Impératrice s’en tirèrent avec quelques égratignures. Ce n’est pas le seul attentat auquel Badinguet échappa, par ailleurs. Je crois qu’on en compte une bonne dizaine… Et ce coup-là, il y eut tout de même aussi une dizaine de victimes parmi son escorte. Dont un garde impérial, amputé des deux jambes et auquel l’empereur, allant visiter les victimes à l’hôpital militaire juste après la représentation – protocole oblige -, épingla sur la poitrine sa propre Grand-Croix de la Légion d’Honneur, toute en diamants…
    Ahlàlà ! On savait vivre, à l’époque !
    T.O.

  3. « Péroraison de cet appel du 4 mai : « Rien n’est écrit. Dessinons un monde meilleur »
    Ben il s’annonce bien, le monde meilleur !
    Bon, soyons sérieux pour une fois Tibuche… On ne sait pas encore comment on va prendre soin de ce monument en péril que constitue désormais Notre-Dame, mais y’a d’autres monuments délabrés qu’ont déjà droit à un traitement de faveur : La REM vient de révéler qu’elle va, après Loiseau de mauvais augure, faire appel à Troâffarien et Cohn-Bandit pour redorer son blason aux zorropeuènnes : place aux jeunes !!!
    Ôtez-moi d’un doute ; l’espèce de Cohn en question, c’est pas celui que j’ai croisé jadis en 68 sur les barricades, du temps de ma folle jeunesse ?? Décidément, la REM, c’est comme la vieillesse : un naufrage ! À force de retourner sa veste d’un bord à l’autre du Rhin, y sait plus où sont l’envers et l’endroit, le pauvre ! Je me demande s’il ne serait pas humain de l’achever, ce Bendit-là : on achève bien les chevaux, alors pourquoi pas la même chose avec les ânes ???
    Y’a au moins un domaine où la REM aura pulvérisé tous les meilleurs scores : le ridicule. Comme disait mon grand-dab : quand y’en a plus, y’en a encore ! À qui le (re)tour la prochaine fois ? Chichi-le-bâveux ? Au moins lui était sympa, même si sur le plan efficacité… Suffira de l’équiper avec un fauteuil roulant à seau-hygiénique intégré, des couches culottes et un gilet jaune : ça devrait le faire, non ?
    Bon, je retourne pleurer de désespoir sur mes salades : que tout ça soye pas perdu pour tout le monde, au moins !
    T.O.

    1. Nonobstant vos vitupérations anti-Cohn, je persiste dans mon estime pour ce type, qui a comme tout le monde pris de la bouteille depuis 68, et de la jugeote en même temps – comme la mère Loiseau, d’ailleurs, venue du bord opposé -, qui est un des rares à ne pas causer la Languedebois, et à rester assez logique dans ses positions écolos et européistes. Vous avez 32 listes : l’embarras du choix de l’indifférence, de la déraison, des rengaines habituelles, des espoirs chimériques, etc.

  4. « Chouette culture ! vous imaginez Binoche ou Bonnaffé débitant sur le plateau leur texte en écriture inclusive ? »

    Oui, le phénomène est d’autant plus drôle de la part de comédiens censés plus attentifs que quiconque aux textes.
    Mais le temps est à la simplification. Terminée l’époque où l’on distinguait un comédien ayant reçu une formation théâtrale de l’acteur de cinéma pour lequel seule la plastique comptait – quitte à personnifier une caricature – puisque le doublage de voix est là pour surseoir aux défaillances de diction. Vous m’objecterez qu’il existe bien des souffleurs au théâtre. Certes, certes, mais en dehors de la Comédie française, il paraît que l’on n’en compte plus guère. Et puis le temps est venu des prompteurs qui équipent jusqu’aux smartphones…
    Aujourd’hui, le terme d’acteur semble bien avoir pris le pas sur toute autre distinction. C’est qu’il ne faut fâcher personne. Un petit coup d’oeil à la bio de Mlle Binoche (dont j’apprécie fort le talent), sur Ouiqui ? La fiche personnelle la classe comme actrice. Mais si l’on entre dans le détail du texte, elle est fille de comédiens, passée elle-même par le Conservatoire national supérieur d’art dramatique…
    Pourtant on lit à propos de sa mère :
    « Sa mère est la comédienne franco-polonaise Monique Stalens (pl)… devenue ensuite professeur de lettres, fondant plusieurs théâtres dans les lycées où elle enseignait, puis à nouveau actrice »
    Bon tout ceci n’est pas mortel, n’est-ce pas, l’important étant de balayer large. Et tant pis si quelques vieux grincheux se sentent « impactés grave » !
    Pour se consoler, on peut revoir « Chantons sous la pluie » et plus particulièrement le duo Lockwood-Lamont.

    1. Le talent d’actrice de la Binoche (plastique ET art dramatique) n’est pas en cause ; elle en vaut bien d’autres ! au reste et au besoin le cinéma permet de faire aujourd’hui des merveilles avec pas grand-chose. Je traitais de cette tribune opportuniste et putassière où elle s’est commise, baveuse de complaisances, finissant dans la niaiserie : « demain sera meilleur », sous le haut parrainage de John « Let it be » Lennon. Let it be : ainsi soit-il !

  5. Ahahahhh, Tibuche en défenseur de Cohn-Bendit ! Votre colonne au pinacle vient d’en prendre un sérieux coup dans les g’noux et dans mon estime, très cher ! J’étais à ses côtés sur le Boul’ Mich en 68 – avec d’autres comme Alain Sauvageot et/ou un autre qu’a eu une fin tragique : Rudy Dutchke ; moi en tant que massier de l’Ecole des Bx Arts de Lille… Or je puis vous dire que déjà à l’époque, la sincérité de son « engagement » nous interrogeait… jusqu’à ce que, des années plus tard, il devienne commentateur de foot à la télé ; là, y’avait plus de doutes ; du moins dans mon esprit : son côté batteur d’estrade sans vergogne avait bien pris le dessus ! Et je ne vous parle pas de la sévérité à son propos de mon ami Luc Grün, peintre strasbourgeois, aux grands moments de la Sorbonne ! En outre, je vous fais remarquer que je me suis gardé de toute accusation « ad hominem » au sujet de ses mœurs présumés vis à vis des enfants, dont je persiste à penser qu’elle n’a rien à faire dans sa « vie publique » parce qu’elle tient probablement plus du désir de le salir que de quoi que ce soit de fondé : au cas où vous l’auriez oublié, la politique est un monde sans merci ni scrupule, où le sens du spectacle l’emporte sur tout le reste !
    Tiens, à propos du spectacle : au moment où je vous écris, je ne sais pas ce qui en est de « l’affaire » du TABAC-PMU de Blagnac, à 300m de l’ex-maison de mes parents où j’ai habité de 81 à 99 et suis allé régulièrement acheter mon « Géo » et parfois « Libé », mes Boyards-Maïs (du temps que je fumais !) et, à la saison où tombaient les feuilles, ma vignette auto… Mais l’extraordinaire déploiement de flicaille (dont certains hilares…) que j’ai entrevu hier swär à la télé m’a laissé pantois ! Tout ça pour un gamin de 17 ans, même armé !!! Un marteau-pilon pour écraser un moustique… Et jusqu’au premier ministre descendu spécialement de Matignon, paraît ! Je connais bien le lieu, donc : la Garonne est à 40m à gauche et la bâtisse est bordée devant-derrière par des rues. Une vraie nasse… fallait vraiment n’avoir aucune expérience de la chose pour aller se fourrer dans un tel piège à rats ! Je ne sais pas ce qu’il en est à cette heure (10h du mat le lendemain) mais, puisqu’il a libéré ses « otages », j’espère que les bataillons de flics qu’on a lâchés contre lui auront été assez malins et expérimentés pour s’en saisir sans dégâts ! Apparemment, c’est un malade, pas un terroriste ! Et ce genre de malade, c’est bel et bien la Société elle-même qui les génère à force d’exalter la violence partout et en tout temps, alors…
    Mais une fois encore, fallait « montrer ses muscles et son « efficacité » : Dormez braves gens, le guet veille sur vous…
    Guy Debord, où es-tu maintenant qu’on a besoin de toi !?!?
    Bien à vous !
    T.O.

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