On touche le fonds, là

Si vous empruntez la très pénible nationale Cholet-Poitiers  (camions, camions, camions, bandes blanches continues à gogo « pour votre sécurité », micro-hameaux à traverser religieusement à 50 km/h, les yeux braqués en alternance sur l’éventuel gamin qui pourrait traverser en courant après son ballon, et sur l’aiguille du tachymètre, et j’en passe) – route nulle quant aux paysages traversés, bref moche de chez Moche – vous ne pouvez pas rater l’usine Heuliez, gros machin trapézoïdal près de Bressuire, à gauche en venant de Cholet. Eh bien, cette superbe entreprise bat de l’aile, n’a plus de sous. C’est dans tous les canards, je ne vous apprends rien. Et alors ?

Et alors, l’Hibernation nous conte que Ségo et Jean-Pierre, les ennemis du Poitou (ne vous méprenez pas, ils n’ont rien contre le Poitou, ils seraient plutôt pour, mais ils sont du Poitou, et ennemis), Raffarin et Royal, donc, tous différends mis en berne, volent au secours d’Heuliez.

Je cite le journaleux : « Au coeur du débat, il y a le fameux FSI, le Fond d’investissement stratégique, créé par Nicolas Sarkozy pour venir en aide aux entreprises en difficulté. Ségolène Royal, dans son intervention sur le site d’Heuliez, en a profité pour demander des éclaircissement sur le fonctionnement de ce fond… »

Oui, comment ça fonctionne, ce machin, là, le FSI ? y aurait pas un double fond ? et l’orthographe aussi, elle est à double fond ? fonds, alors, s’il est double ???

Allez, fond, fonds, c’est pas grave… surtout quand on est en fonds. Le FSI, mesdames-messieurs, c’est en fait un fonds ; mais à piquer dedans, il font, et on en atteindra bientôt le fond. Le fond du fonds… le fond du Poitou, pardi. Le fin fond.

Si c'est comme ça…

Si l’école, le collège public ressemble, même de loin, à ce que j’ai pu voir hier soir sur Arte (« La journée de la jupe », Adjani-Podalydes-Spiesser etc…) alors mes amis, je suis absolument ravi d’avoir subi des profs durs, exigeants, autoritaires, tyranniques, parfois injustes, mais avec qui on apprenait, efficacement, et dans le calme.

Et si la prof’ de français a la miraculeuse occasion de tenir un flingue dans sa main pour – enfin – pouvoir faire cours dans un silence attentif et tendu, ça donne bien la mesure de ce qu’il faudrait peut-être envisager pour pouvoir dispenser correctement l’enseignement public et nécessaire ! si ce n’est pas une question de rapport de forces, qu’est-ce ?

Ver erat

« Ver erat »… C’était le printemps ! En latin, et pas n’importe lequel, le latin du thème latin de la compal de latin où Rimbaud Arthur, en 1868, 14 ans, emporta haut la main le premier prix de thème latin, à Charleville. Sur un thème original d’Horace, en latin itou.

Pour votre gouverne, pour la culture, qu’on étale comme la confiture, la suite : Ver erat, et morbo Romae languebat inerti Orbilius… » : C’était le printemps, et à Rome Orbilius, malade, s »étiolait ».

Eh oui, c’est le printemps, pas trop tôt ! l’hiver 2008-2009 a été précoce, long, opiniâtre, rugueux, neigeux. On lui dit salut, sans regret.

Mais si je vous cite Rimbaud, c’est aussi que « Verts errâtes« , ou « verts et rates », à la rigueur : les Verts font parler d’eux, en ce lendemain de grosse manif’ et moyenne grève. Voyez plutôt : le Figues-à-rôts nous apprend que « Les Verts prennent leurs distances avec le PS« . Errent-ils, les Verts, ce faisant ? (et non pas ce faisan !).

De mon petit point de vue, ils ont bigrement raison. Je ne partage pas, loin de là, toutes les lubies des Verts : le massacre du boulevard St Marcel, à Paris, reste un stigmate sur leur peau, et leur haine-obsession de l’énergie nucléaire relève du pathologique. Mais… le PS relève, lui, du bateau ivre (encore Rimbaud ! ) et s’acoquiner avec lui relèverait de l’aveuglement politique. Quant aux innombrables chapelles, sectes, groupuscules de gauche, d’ultra-gauche, de gauche radicale, laissons les refaire le monde en petits comités.

Non, les Verts doivent avoir une autre approche de la société. Nous sommes 6 milliards de mammifères supérieurs, ou supposés tels, et capables de foutre notre planète à feu et à sang, ou de la conserver vivable, c’est selon. Cela vous a des implications qui transcendent le strict jeu politique : sociologiques, environnementales, économiques, morales ; c’est une autre quête que de ramer pour prendre le pouvoir en 2012…  allez, Martine, allez, Ségolène, allez, Laurent, Benoît, François, ramez, ramez en rond.

Crisologie et solubilité

La crise (prononcer Kkkriîse) sera-t-elle soluble dans les flots de fric que les états – dont le nôtre – abreuvent les sillons des banques ? cette thérapie semble en tous cas avoir des effets bénéfiques sur le niveau des primes versées aux cadres des institutions financières, responsables de la mouise où ils se / nous ont mis : belles primes, de quoi arroser ça, donc, voyez AIG aux USA.

Autre question, la crise sera-t-elle soluble dans les cortèges de manifestants et les beuglements « Sarko des sous » ? entendra-t-elle les voix qui montent vers elle, les complaintes itératives et chroniques des enseignants, les états d’âme des chercheurs, aura-t-elle pitié des fonctionnaires et assimilés, partis aujourd’hui pour leur 4.974 ème République-Bastille, ou Nation-République ?

A vos statistiques syndicats-police, ce soir… comme d’hab.

Les prix Y'a good

On nous annonce qu’un jury d’humoristes et de personnalités a décerné des « Y’a bon awards« , parodie supposée récompenser / stigmatiser les Français les plus racistes. Les Français racistes BLANCS, évidemment.

Deux remarques :

– Ni M. Dieudonné, humoriste pas blanc, ni M. Domota, pas blanc non plus, grand chef de la récente grève en Guadeloupe et auteur de remarques douteuses sur les « békés », n’ont été primés. Ils auraient largement mérité de concourir.

– « Y’a bon » c’est du français parodique, du colonialisme daté en béret et baguette de pain. « Awards » c’est du Rosbif. Qu’est-ce que c’est que ce salmigondis ? « Les prix Y’a bon », « Le grand Prix Y’a bon », « les Césars Y’a bon », ça ne le ferait pas ? ce serait trop français ? ça ne fait pas assez branché ?

Profession : militant

Le très controversé grand chef de la CFDT, le barbu à lunettes que je considère, à tort peut-être, comme le seul dirigeant syndical qui ne parle pas un double langage – les autres rament pour Pierre Paul ou Jacques, ou pour des motifs inavoués – j’ai nommé François Chérèque, a des mots qui fàchent chez les Militants, je veux dire les militants trotskystes, alias NPA, puisque c’est comme ça qu’ils ont repeint leur enseigne.

Et que disait-il donc, pour fàcher le postier de Neuilly ?  Que les militants du NPA font « un peu rapaces » dans les conflits sociaux en cours. Et certes, pour avoir vu de près, de visu, vécu ces situations, je peux opiner du chef, confirmer, approuver, apporter de l’eau à son moulin : la « juste ligne », comme on dit chez les militants, le fil conducteur, c’est de tenter de faire mousser partout où ça pourrait mousser, de remuer la soupe pour que ça gargouille, de touiller les problèmes personnels des entreprises pour que ça fasse le plus possible de remous. La consigne du NPA à ses militants : à la porte des boîtes ! pour y porter la bonne parole aux masses laborieuses.

Citation d’Olivier le postier : «Si François Chérèque est surpris de voir des militants anticapitalistes à la sortie des entreprises, il va falloir qu’il prenne sur lui parce qu’il va en voir de plus en plus. C’est notre travail à nous militants d’être là au quotidien».

Double journée, donc, pour les militants qui bossent par ailleurs : faire ses 7 ou 8 heures de boulot, PLUS « le travail au quotidien ». C’est leur travail à eux militants. Et sans perspective de retraite, ou alors très très tard, voyez Arlette.

Ce que ne dit pas Olivier le postier, ce qu’il cache pudiquement, ou adroitement, parlant de « militants anticapitalistes à la sortie des entreprises », c’est qu’il les envoie aussi à l’entrée des entreprises ! eh oui. Et à l’heure où ça embauche dans la métallurgie ou la chimie, faut se lever tôt !! dure journée que celle du militant.

Après le sommet, ça descend

« Alain Bashung était au sommet de son art« , nous balance-t-on dans un vibrant hommage (*).

D’abord, on n’aurait pas eu droit à ce genre de littérature si Bashung était toujours de ce monde. Le journaleux aurait trouvé totalement inintéressant de nous tartiner un article sur Bashung.

Donc, premio : si l’on vous tartine des hommages, dites-vous que c’est posthume.

Deuxièmo : « au sommet de son art » ? vraiment ? il progressait donc encore, Bashung ? ou bien se déplaçait-il « en palier », sur un plateau ? De fait, s’il progressait toujours, il est bien évident qu’il a atteint le sommet de son art… puisque dorénavant il n’aura plus guère l’occasion de l’exercer, son art.

Troisio : C’est le bon moment pour partir et tirer sa révérence, « le sommet de son art ». Après, on ne pourrait que débiner, se répéter, décliner… après le sommet, ça descend. Chapeau, donc, M. Bashung, c’était pile le bon moment pour partir.

Quatrio : Chapeau, justement, et lunettes… exactement le même chapeau que Leonard Cohen. Pile poil. J’ai été frappé, le lendemain des Victoires de la zizique 2009, de la ressemblance scénique entre Bashung et Cohen, le Cohen d’il y a quelques années, tout de même – c’est une remarque élogieuse, je vous le dis, je révère Cohen – mais personne ne s’en est avisé… nous avions notre Leonard Cohen, et ne le savions pas.

Il nous reste l’autre, le vrai, un peu décavé, évidemment, mais la voix est toujours là, et lui ne fume pas.

(*) Vous avez remarqué ? les hommages sont parfois appuyés – sur quoi ? – mais plutôt vibrants : ils  vibrent très facilement. Au point qu’il est interdit à la troupe de marcher au pas cadencé devant un hommage.

C'est comment qu'on sonde

Le Monde nous invite à voter ! et pas besoin d’être inscrit au Monde-sur-la-Toile pour voter : si vous avez Internet, vous pouvez voter ! Pas du tout comme lorsque vous tentez de placer votre petit commentaire sur ceci ou cela (on vous rappelle alors, hélas, que c’est réservé aux abonnés).  Ici c’est gratoche, vote qui veut.

Et que vote-t-on ? « La comparaison faite par le réalisateur du film « Welcome » entre les arrestations d’immigrés clandestins aujourd’hui et les rafles de juifs sous l’occupation vous paraît-elle… »

– Fondée (40 % à l’heure où je mets sous presse)

– Déplacée (55 % dans les mêmes conditions).

… et QSP pour 100 %, soit 5 % qui ne savent pas (des rafles de juifs ? ah bon ? où ça ? quelle occupation ? )

Tout ça est assez rassurant, somme toute. On matraque, de Libé au Monde en passant par Télérama, le PS, les Verts, des tas de chrétiens, les trotskystes de tous parfums, et même le PCF… bref toutes les bonnes âmes, sincères ou manoeuvrières, que nous vivons une époque affreuse, avec un président affreux, c’est affreux, on agit affreusement : stoppons, stoppez séance tenante cette affreuse chasse aux immigrés.

Mais nonobstant ce matraquage, il se trouve 55 % de compatriotes qui ne suivent pas. A vrai dire, nous proposer « Police Sarkozyste = Gestapo »  ? (ou la Milice, ou les flics collabos…) ?  c’est assez gros, non ? ça donne assez dans la caricature tirée par les cheveux. Et, non, ça ne prend pas.

Les rafles de Juifs (et de communistes, de résistants, d’opposants, d’homosexuels, de Tziganes…) visaient des citoyens Français, ou pas Français, peu importe, pour les emmener à Pétaouchnock et à la mort planifiée. La recherche de clandestins vise des gens qui sont entrés sur notre territoire en violation de nos lois. On les sanctionne donc dans le cadre de ces lois – on est dans un état de droit. Evidemment c’est coercitif, ce n’est pas drôle, ça n’est pas une partie de plaisir, ça dérange, ça peut se faire dans la douleur, il serait bizarre que ce soit agréable et souriant. Mais non, ce n’est pas le wagon de marchandises bondé pour Auschwitz.

Welcome », donc ? welcome dans une entreprise d’amalgame « Mondain » et de manip’ à la culpabilisation.

"Les libraires tapis

… derrière leur comptoir attendent le client, moroses mais fiers. »

Cette phrase absconse, je vais avoir ici l’honneur et le plaisir de la commenter pour vous, cher lecteur.

[ Je ne dirai rien de la tuerie de Willenden en Allemagne, où un ado de 17 ans a fait 16 victimes violentes, en l’incluant dans le décompte. Je n’en dirai pas rien, mais juste ceci : comme toujours, ce sont des hommes, je veux dire des mâles, qui font ce genre d’horreurs. Merci aux femmes, ça adoucit un  peu ce monde de brutes.]

Donc, muni de mon ordinateur, je parcourais des yeux un blog de libraires, en ce beau matin lumineux de vendredi 13 (on s’en fout, la suite !! ) et je tombe sur un gars qui défend son bifteck, sous le titre « L’éternelle complainte du commerçant« . Ce libraire, donc, discute de la filière du livre, des marges des différents acteurs… ce qui me fait souvenir d’un épisode récent, rue Geoffroy-Saint-Hilaire à Paris (5ème) que je m’en vais vous conter ici, séance tenante.

Nous flânions donc, ma louloute et moi, sur le trottoir de cette rue, et avisons, devant la devanture d’une librairie, un étal de caisses de livres manifestement usagés, bref, de livres d’occasion. Bien rangés, avec le prix au crayon en haut de la page de garde.

Ma compagne et moi fourrageons – nous sommes des fous rageurs – et la voilà qui sort un bouquin ( « Le dieu des petits riens« , de Arundhati Roy), qui visiblement l’intéresse bigrement. Livre en assez bon état, mais pas trop… au prix de 10 euros (*). « Trop cher », dit-elle, et de remettre l’objet dans sa caisse, et de passer son chemin.

« Attends », lui lancé-je, « je vais voir si on peut l’avoir à moins, ça vaut le coup ». Armé du bouquin, j’entre précautionneusement dans la boutique, retenant mon souffle, non par émotion, mais parce que le libraire est en train de fumer un gros cigare, lâchant des nuages de fumée nauséabonde.

– « Ce livre, on peut l’avoir pour 7 euros ? »

(visiblement contrarié, derrière son écran de fumée) – « Je vends des livres, pas des tapis ! »

– « Mais pas de problème, c’est juste une proposition, c’est vous qui décidez, mais à 10 euros vous pouvez le garder. »

Et je sors, je remets le livre en place (je me fais engueuler car ce n’est pas le bon emplacement, paraît-il) et je m’en vais.

De retour chez nous, on a commandé ce livre sur la Toile ; chez « A-notre-zone » ils en avaient d’occasion autour de 5 euros. Il a certes fallu attendre 3 jours, mais on a tenu bon, on s’est occupés comme on a pu 😉

Moralité : il existe un marché du livre d’occasion, et tant mieux : lisons, lisons, c’est bon pour l’intellect. Que la Toile y joue un rôle, tant mieux aussi. Que certains libraires fassent comme si la Toile n’existait pas, tant pis pour eux. Ils ne vendent pas des tapis, soit ! noble objet que le livre. Noble métier que celui de libraire. Mais un livre (que ce soit Les pensées, de Blaise Pascal, ou une quelconque niglerie de chez Arleuquint), c’est aussi – et concrètement – du papier, de la colle, de l’encre, et basta. Et d’occasion, en plus !

(*) Contrairement aux markéteux débiles qui nous abreuvent de 9,99 ou de 14,99 ou de 39,95, les gens normalement constitués – et même les libraires fumeurs de cigares – proposent des chiffres suffisamment ronds.

TVA, réduction aux petits légumes

La France, cocorico, a obtenu, de haute lutte, le droit de baisser la TVA sur la restauration. Chic, vous dites-vous, on va pouvoir se payer de bonnes petites bouffes un peu plus souvent, ça va être moins cher chez Roger la Frite et chez Hipopote-à-mousse !

Grave erreur ! Premio, on n’a jamais vu que les restaurateurs aient répercuté la moindre baisse des produits alimentaires (le porc, par exemple). Pourquoi répercuteraient-ils la baisse de  TVA ? Moi je vais vous donner en avant-première et par avance tous les bons arguments qu’ils vont vous sortir pour justifier de s’en mettre un peu plus dans les poches :

– La restauration paye mal, on va pouvoir augmenter les salaires.

– Les effectifs sont justes justes, on va pouvoir embaucher.

– On ne vous a pas répercuté pleinement la hausse des matières premières (tu parles…), on va pouvoir se refaire un peu.

– On va pouvoir travailler un peu plus dans la qualité (traduisez : comme d’hab’, sauces en pots de 5 litres de chez Metro, micro-ondes et assemblage avec un cornichon en éventail et une feuille de salade).

– On va pouvoir investir, il y a longtemps que l’on galère avec du vieux matos.

Bref : TVA réduite, que du bonheur pour les cafetiers bistrotiers cuistots etc.

En revanche, baisser la TVA sur les ampoules à économie d’énergie, sur les produits écologiques, « verts » ? il n’en est pas question, ce ne serait pas pédagogique : comme la psychanalyse, il faut que ça coûte, sinon où serait la motivation ? je vous le demande.