On a les ministres qu’on peut, qu’on nous donne plutôt… généralement tout ministre un peu chevronné a fait un large circuit par divers maroquins, s’essayant à la Santé, s’asseyant aux Transports avant de se poser à la Justice, valse des chaises qui se pratique depuis très longtemps. Ce n’est pas qu’ils soient mauvais, c’est qu’il faut “rafraîchir” l’affiche, garder un peu de pep’s, renouveler les trombines, sinon le public se lasse.
Celui qui vous vaut ce billet s’appelle Barnier, il a lui aussi fait son circuit, son tour de piste, mais il paraît fatigué, déconcentré, et manifestement il a un urgent besoin de lunettes, myope comme il est. Lisez plutôt !
J’avais déjà commis un billet sur l’opacité de la filière pêche ; voir ce lien. mais ici ce sont des pros, c’est certainement mieux expliqué ; voyez ces morceaux choisis, au fil de ce croustillant article poissonnier du Figarôt :
Le pêcheur : «On n’arrive pas à expliquer au pêcheur comment le prix de son poisson, qui lui est payé 4 ou 5 euros en moyenne le kilo, se retrouve à 27 euros en magasin.” Eh oui, idem pour les consommateurs, on n’arrive pas à leur expliquer, ces 22 à 23 euros de différence. Rassurez-moi, ce fric ne se volatilise pas, quand même ? Il doit bien tomber quelque part ?
Un ponte du circuit poissonnier : «Il n’y a pas un maillon de la filière qui fait des marges systématiques au détriment des autres, explique Michel Peltier, directeur de l’Ofimer (Office national interprofessionnel des produits de la mer), qui a mené une étude approfondie sur la question. Cela varie beaucoup selon les espèces et les dynamiques de marché.» L’admirable langue de bois que voilà !!
La filière est assez simple : les pêcheurs, les mareyeurs (les criées), les transporteurs frigorifiques (souvent les mareyeurs eux-mêmes, ou des sous-traitants), les grossistes (les MIN, marchés régionaux), les détaillants, qui trimballent leur marchandise ou se la font livrer, et les consommateurs. Ils sont six. Il y en a 1 qui vend, 1 qui achète, 3 ou 4 intermédiaires. Pas terriblement compliqué, non ?
Eh bien, monsieur le ponte, il y a un maillon de la filière “au détriment de qui” on fait des marges systématiques : le consommateur. Et si, à part lui, il n’y a pas “un maillon de la filière qui fait des marges systématiques au détriment des autres”, c’est que tous les maillons (*) se sucrent (trop) abondamment, mareyeur, grossiste, détaillant. Simple, non ? mais trop compliqué pour le ministre des pêches.
Et, toujours aussi simple : pour que les prix baissent, il faut que ces intermédiaires baissent leurs marges, donc leur niveau de vie. C’est limpide. Mais pourquoi diable le feraient-ils ? pour faire plaisir au ministre des pêches ?
Autre extrait de ce beau discours en bois : “Les possibilités de marges sont plus importantes sur des poissons non nobles, type maquereau, payés peu cher au producteur, que sur des espèces nobles telles le saint-pierre, le turbot ou la sole“. Eh bien wouala ! Si “les possibilités de marges sont plus importantes blablabla…“, croyez-moi, ces possibilités ont été immédiatement exploitées, et pas qu’un peu. Et donc, c’est que les possibilités de réduire ces marges importantes (de 1 à 7, pas mal, non ?) existent !! On peut donc immédiatement baisser les prix de détail sur le maquereau, le hareng, le rouget-grondin, le tacot, la plie, le merlan, le lieu noir, la roussette, la sardine, et je dois en oublier.
Quant aux poissons “nobles”… le turbot ? élevage. Le bar ? élevage. La dorade royale ? élevage. On en fabrique des milliers de tonnes, les Espagnols les trouvent bien moins cher que nous. Poissons nobles, mon cul, comme disait Zazie, qui sur cette interjection ne zézayait pas.
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(*) sans oublier notre vorace number-wouane : l’Etat ! TVA, taxe pétrolière, taxes sur les entreprises, à tous les étages il se goinfre.