Les Dularex de mon enfance

On fait du Perec, là… « Je me souviens »… des assiettes transparentes Radulex que nous utilisions, au réfectoire de mon pensionnat ; avec la couronne extérieure genre pétales de marguerite. Les soirs de potage façon brouet clair amélioré aux pâtes-alphabet, on alignait les lettres du bout rond du couteau, on touillait le bouillon pour faire des phrases, histoire de tordre le nez sur la bouffe. Et parfois – mais si c’est vrai ! – faute de vaisselle idoine, et comme la tradition orale le rapporte, pour accueillir la bouse de compote de pommes « sortie de boîte » ou le petit-suisse dans son cylindre de papier, on retournait l’assiette, après l’avoir épongée convenablement .

Vous imaginez les diners d’état à l’Elysée avec de la vaisselle transparente Rudalex ? un peu fatiguée, la vaisselle, usée par les tournées de lave-vaisselle, transparente mais pas trop, quasi atteinte de cataracte… la reine de Mésopotamie torchant d’un bout de pain les restes du boeuf miroton (ou blanquette de veau, petit salé aux lentilles, pot-au-feu…) dans son assiette avant de  la retourner pour y loger le calendos crémeux et puissant, le pain perdu du chef ? ben non. Il y faut un peu de décorum, tout de même. Faire valoir le contenu des assiettes, et les assiettes avec.

Combien ça coûte, ce prestige national ? ça coûte cher ! les dîners d’état à l’Elysée ça coûte cher, plus cher que le mythique risotto crevettes-artichaut du Fouquet’s ou la salade de mâche à la truffe blanche de chez Laurent. Tiens, rien que de stipendier le nombreux personnel des cuisines, sans qu’il bouge un cil, avant même qu’il saisisse le couteau économe pour plucher les courgettes, ça coûte un max ; faut ce qu’y faut. Alors on a un gros débat sur les bras : combien a coûté le paquet de vaisselle en porcelaine (mille-deux cents assiettes) qui vient d’être acheté par l’Elysée à la manufacture de Sèvres ? cinquante-mille euros ou dix fois ce prix ? les gars de chez Mélenchon, les Insoumis, ceux qui croûtent dans de la vaisselle KAIEA à trois balles et en sont fiers, évidemment, ils en font des caisses, de cette histoire de vaisselle. Monsieur Ruffin, inévitablement inspiré par les révélations du Palmipède-Entravé, ironise sur le sujet, c’est du tout cousu : « ils pètent dans la soie, là-haut (*), pendant que nous on racle les fonds de frigo pour trouver à croûter sur un coin de table« .

Moi je vous fiche mon billet que Macroléon n’a même pas vu passer sur son bureau la commande des assiettes de porcelaine : ce n’est pas son job. Quatre-cent-quinze euros UNE assiette pour la reine de Mésopotamie ? et alors, que voulez-vous que ça lui fasse ? il n’a même pas idée de ce que ça coûte. C’est très certainement un vague, un obscur intendant-fonctionnaire qui a signé le truc. Moi j’aurais fait un appel d’offres, c’est tout de même un minimum pour une somme pareille, j’aurais demandé des devis. Mais bon, à part cette entorse évidente aux règles administratives, ça fait bosser les entreprises françouaises, et puis ça augmente le PIB. C’est bon ça coco l’augmentation du PIB, les Insoumis eux-mêmes en sont d’accord.

Tibert

(*) Dans un de  mes vieux numéros de Hari-Kira, le regretté professeur Choron avait publié une fiche-bricolage à cet effet. Simple et efficace : on coud à l’endroit adéquat un carré de soie au fond de son slip, et voilà !

3 thoughts on “Les Dularex de mon enfance”

  1. … On dirait qu’il est tout comme pas bien dans son assiette, notre Tibuche ce jour d’hui ?
    Bon, que la reine de Mésopotamie ait décidé de changer la vaisselle du palais, ça vous étonne ? Moi, (pardon…), elle me rappelle tout à fait Elizabeth T’es Lord en reine de Sabbat (comme ça) arrivant à Rome avec ses bagagistes pour un ouiquende en amoureux chez Marc-Antoine… Ou c’était encore le divin Jules, à ce moment-là ? J’ai oublié. En tout cas, je trouve qu’il y a de ça ; on est une maîtresse-femme ou on l’est pas. Point barre.
    — Comment, point virgule ??? de la vaissloche qu’y a déjà une aut’ qu’a mangé dedans ??? Je retourne à Alexandrie de ce pas. Et toc. Je suis pas venue de si loin pour bouffer dans un Mac Do, même doré sur tronche. Et retoc.
    En outre, M’âme Cléo Taylor, elle avait de ces yeux violets qu’on n’a jamais revu les mêmes : ça donne des droits.
    À propos de tronche toujours, le coup de la piscine au bord du Frégançon, c’est pas mal non plus. Sauf erreur de ma part, Normal 1er avait pas eu honte d’aller mélanger ses arpions avec ceux du prolétariat en train de rissoler à grand renfort d’En-Bressolaire et en boxer-short rayé sur la plage en contrebas dudit fort. C’était plutôt sympa je trouve ; même si ça dévoilait du même coup « du temps les effroyables outrages » – et aussi ceux d’un régime pas très équilibré – sur sa bedaine bien rembourrée. Mais pour qui qu’y se prennent donc, les Maqueron & C° ??? Va falloir inventer le « Complexe du Roi Soleil » rien que pour ces deux-là ?
    Revenons à nos assiettes : j’ai eu le même modèle que Tibert à la cantoche de l’Ecole Jean-Macé-Pasteur* de Roubaix au tout début des années 50. Et comme c’était une municipalité socialo grand-teint – du temps que le mot « socialo » avait encore un sens –, ben y’avait des tas de mes copains qui y bouffaient gratis faute de revenus suffisants de la famille ; même que c’était leur seul vrai repas de la journée. Ça et les verres « Duralesque Culbuto » zidoines, ça m’est resté. Et les jours que le rata était vraiment immonde, ou retournait les assiettes PLEINES sur le formica tigré pour laper la confiture, la compote ou le flan-vanilline tremblotant à même leur cul en Pyresque.
    Je me demande ce que ça donnerait si on imposait ce genre de choses aux élèves d’aujourd’hui ? Quant à la cuisine Halal ou Kasher, laissez-moi rire ! et pourtant, des n’tits zarabs, on en avait pas mal parmi les copains. Mais ils étaient déjà bien trop contents d’avoir à bouffer, alors cochon qui s’en dédit !

    (*) Jean Macé-Pasteur ? Une union contre nature bien avant le PACS et les LGBT, non ? M’enfin, des fois, l’amour, c’est pire que la rage…

    1. A l’heure où j’ai mis sur Toile, le devis de la future piscine de Brégançon n’était toujours pas connu. ce serait, dit-on, une hors-sol, armature en plastique rainuré teinté dans la masse, diamètre quatre mètres quatre-vingt et un mètre trente de haut. On la remplit aisément avec le tuyau d’arrosage des plates-bandes : c’est un investissement raisonné, très loin du ruineux four à pizza voulu par Sarko pour son aéroplane présidentiel !
      Et pour Pépère ? il avait un faible pour la Lanterne, ce délicieux pavillon de détente planqué à quelques encâblures de l’Elysée. Nos maîtres ont leurs petits penchants, comme tout le monde ; la différence, c’est qu’ils peuvent s’y adonner.

  2. … Mouii. Et pourquoi que M’âme Macron, a va pas se l’acheter elle-même et en personne au BricoMarché du coin ou chez Quat’ENA sa piscine, si elle y tient tant que ça ? Après tout, du temps que son (jeune) époux se lançait dans la retape pour sa place actuelle, elle avait pas peur d’affronter les foules pour faire l’article, paraît. Alors ? Caisse y’a de changé ? Elle a égaré sa carte de fidélité ?
    Certains esprits, aussi sourcilleux qu’insinuateurs (si-si) m’ont demandé par mail privé si moi zaussi, je bouffais gratis à Jean-Macé-Pasteur en tant que petit rejeton de grand bourgeois* ? Ben non : même que mon popa, il avait demandé à payer pour deux ou trois, pour les ceusses qui pouvaient pas. Et que deux ou trois fois par an, ma soeur aînée (83 ans aujourd’hui et en plein Alzheimer. La cata…) faisait le tour de la famille pour ramasser toutes nos fringues devenues trop petites. Puis elle allait – avec un gros balluchon sur son vélo – organiser une séance d’essayage à l’école avec la complicité de mon Instit’ Madame Delmotte (gloire immortelle à elle !) pendant la récré de 10 h, exceptionnellement rallongée ce jour là. Je peux vous dire que j’ai vu de mes copains de l’époque à poil… ben y’avait pas lerche à bouffer dessus ! Quant aux sous-vêtements, ils connaissaient pas tous…
    C’est vrai que comme moi, ils étaient nés la dernière année ou tout juste après la guerre et qu’à Roubaix du temps de leur gestation, c’était la famine. Moi, j’ai eu la chance d’être conçu à Toulouse pour cause d’exode et côté graille, ça allait tout de même mieux grâce à nos amis agriculteurs : ma mère se plaisait à dire qu’encore dans son ventre, j’avais été engraissé au foie-gras et au confit.
    Même pas honte.

    (*) Mon popa avait tenu à ce que ses garçons fréquentassent l’Ecole du Pile – le quartier Haut-les-Mains – de Roubaix pour que comme les autres, ils soient foutus de rendre coup de galoche pour coup de galoche dans les combats de la vie et non pas confits en dévotion chez les Très Chers (à tous les sens du terme) Frères.
    Je me souviens encore de la tête de ma mère le jour où, chez « Bata » ou chez « André » et alors qu’elle voulait m’acheter des godasse neuves, j’ai demandé au vendeur s’il avait pas des galoches avec semelle de bois… Ce qu’elle ne savait pas, c’est qu’à l’école, les « Pupilles de la Nation » étaient dotés gratos d’une paire de ces armes redoutables à chaque rentrée des classes et que nous, avec nos mocassins en cuir véritable, on faisait pas le poids dans les bagarres ! Surtout qu’il y en avait des vicieux qui, au bois, ajoutaient des rangées de clous par-dessous !
    Quelle époque…

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