Malaise de la mâlitude

( J’ai voulu acheter des oeufs, avant-hier… une enseigne de magasins pourtant bien connue, en quatre lettres, commençant par L. Rien ! pas la moindre boîte, bio ou pas, élevées en cage, au sol ou au plafond, rien. Et, attendez : pas la moindre goutte d’huile d’olive, non plus (il m’en fallait). Qu’en déduit-on ? de une, que Donald T. a réussi à nous persuader que la pénurie d’oeufs était planétaire ; de deux, que les Français se gavent d’oeufs frits à l’huile d’olive, c’est évident ; ou, qui sait, des oeufs durs-mayonnaise à l’huile d’olive ? c’est aussi envisageable, et puis c’est doublement consommateur d’oeufs, il en faut aussi pour la mayo. Mais, vous imaginez le cholestérol qui va avec ? c’est terrible. A l’heure où l’on abreuve nos sillons de messages, genre « trop gras trop salé trop sucré » , il serait temps que soit mis l’accent sur la dangerosité du couple « oeufs + huile d’olive » ; j’aimerais bien qu’on m’en laisse un peu. )

Autre chose : les mâles sont en danger, doublement. D’abord, on le sait, les coups de boutoir du sexe opposé, attentif à ce que désormais toute initiative de rapprochement soit validée, ou pas, par un accord explicite, quasi contractuel. Mais de l’autre, et en réaction, c’est l’offensive de la testostérone débridée. On a même un mot pour ça , un truc en  » … ing » , forcément : le looksmaxxing (à vos souhaits). Il s’agit de faire viril de chez Viril, la mâchoire carrément carrée (mâchez de la gomme à mâcher, ça muscle les mandibules), les cils plus courts, les biceps plus gonflés, les poils sur le poitrail… un mouchoir roulé en boule à l’entrejambe, ça peut aider, également.

On a toujours entendu parler de, ou vu, des « body-builders » acharnés (des culturistes, c’était le mot ad hoc, jadis), d’hommes un peu trop occupés de leurs biceps, de leurs abdominaux et de la taille de leur zigounette ; ça atteint désormais le point où l’on y consacre un terme dédié, des articles dans les canards, et des tas de trucs, aberrants parfois, sur les « réseaux sociaux » . Le problème est là : chacun peut se vivre comme prescripteur, préconiser n’importe quoi, être vu par une dizaine de curieux désoeuvrés vissés à leur écran de mobile, propager ses aberrations, sans garde-fou, sans filtre, sans filet. Il faudrait du recul, de l’esprit critique. Et puis surtout trouver autre chose, pour meubler sa vacuité.

Tibert

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