Secrets et géométrie variable

Bon, comme promis je vous cause de ce que j’annonçais dans mon billet précédent. Comme ça vous le lirez 😉  … mais non, je blague !

La violation du secret de l’instruction (la VSI, pour faire court et percutant ). La VSI, donc, ne la prenez pas pour une lanterne : ça peut coûter cher. Je cite :

« « La révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende. »

Et toc ! encore faut-il, pour poursuivre une VSI,  que la Justice…

1) – S’aperçoive que des pièces d’un dossier d’instruction sont sur la place publique, ça fait désordre ! remarquez, il suffit de lire les journaux.

2) – Ne se satisfasse pas de cet état de faits, mais bien au contraire trouve ça anormal, voire préjudiciable – outre que c’est illégal – et qu’on se fout de sa gueule,

3) – Décide de trouver et punir les « fuiteurs », comme elle en a la possibilité.

Or nous avons pu constater, depuis le début de l’ « affaire Pénélope » (il y a eu des tas de précédents, et Le Monde, Médiapart… et d’autres, sont souvent à nous sortir des scoops qui relèvent très clairement de la diffusion d’informations issues de VSI ), que nous sommes abondamment informés par les canards – le Palmipède Emplumé, mais aussi d’autres, dont Le Parigot, friand du sujet Fillon & Co – de ce qui se dit au cours des procédures d’enquête. C’est quasiment un sport national !

Donc des quidams indélicats bien au  courant des dossiers se permettent de refiler régulièrement, à répétition, des pièces desdits dossiers aux journalistes (pas n’importe lesquels ! pas Le Figaro ni Valeurs Actuelles). Quels quidams ? soit des acteurs du premier cercle qui ont accès aux dossiers es qualité, soit des gus que le premier cercle a mis au parfum spontanément ou « pour rendre service », ou parce qu’on le leur demande avec fermeté et de solides arguments – ce qui revient au même, vous en conviendrez.

Et ? et rien. Pas de poursuites, pas l’ombre d’une enquête sur qui c’est qui fait fuiter. A se demander s’il n’y a pas les « bonnes » VSI, et les autres. Voyez celle-là, qui n’allait pas dans le bon sens : N. Sarkozy et B. Hortefeux auraient eu illégalement accès au dossier de l’affaire Karachi, déclenchant les foudres de deux syndicats de magistrats, qui réclamaient une enquête : comment se fait-ce ? c’est scandaleux, c’est une VSI, etc. A l’opposé, que des détails croustillants de la procédure actuelle visant les Fillon s’étalent à répétition dans les journaux laisse ces mêmes syndicats, bizarrement,  impavides…

Mais que risquent les journaleux ? pas grand-chose. En principe on peut les poursuivre pour « recel de VSI » ; mais, comme le déclare l’excellent article de la Toile cité au paragraphe précédent, « dans les faits, les journalistes sont très rarement mis en cause : le secret des sources fait qu’il est quasiment impossible de caractériser la violation du secret« .

Donc… donc ? eh bien sauf à trouver des magistrats assez  gonflés et assez remontés contre ces opportunes VSI à répétition, tout continue tranquillement : les canards vous livrent saignant, et dans le sens qui va bien,  ce qu’ils ne sont pas censés savoir – et encore moins diffuser. Quasiment aucun risque, et ça favorise le tirage.

Total, encore une superbe loi qui ne sert à rien – ah si, elle aurait pu servir sur l’affaire Karachi : ça allait dans le bon sens.

Tibert

Canulars, bobards et votation

Je sais, il faudrait que je tartinâsse sur la Présidentielle. Pffftt… allez, un effort… tiens, un truc : il y avait semble-t-il au moins trois trotskystes au débat de mardi soir sur BéhèFheM : Poutou, Arthaud, Mélenchon, chacun dans une des cinquante nuances grises du rouge de la mouvance trotskyste. Mélenchon ? eh oui, il serait ou aurait été paraît-il « lambertiste » – la chapelle trotskyste qui accueillit Lionel Jospin, Marc Blondel etc… Cela fait trois sur onze : c’est un pourcentage assez énorme, et si c’était le reflet de la politisation du pays, il y aurait chez nous  dix-huit millions de trotskystes : la Révolution appelée de leurs voeux – avec un Grand R Majuscule – serait faite depuis belle lurette, et les élections présidentielles, ce truc bourgeois, aux oubliettes.

Dans la même veine, j’ai lu dans l’Obs que « Mélenchon prenait Hamon pour un con, Benoît s’en rendait compte » :  comme quoi il a quand même un poil de perspicacité, Benoît. Et puis je me suis laissé dire que monsieur Fillon a reçu un paquet de farine sur la margoulette : ah ah c’est tordant, quel humour, après les casseroles la farine, manque plus que du beurre pour faire un roux – mais non, pas un Le Roux !

Rien ne nous aura été épargné dans cette campagne sabotée, biaisée, pleine de coups tordus… mais je voulais vous entretenir des « fake news » : pourquoi des fake news à tous les coins d’articles par ailleurs  en français, alors que ce sont ni plus ni moins des nouvelles bidon ? des bobards ? de l’intox ? des salades ? des vannes ? ( et pourquoi le canular se voit-il systématiquement  supplanté par le hoax ? ) C’est mauvais, bobard ? où ça c’est mauvais ? pourquoi ? à quelle aune est-ce moins bon que fake news ?

Eh oui ça m’énerve, je sais. Mais j’ai toujours pensé – enfin, depuis assez longtemps – que le salut du verbe francophone est dans l’argot : notre argot regorge de mots savoureux, imagés, et qui suppléent magnifiquement aux lacunes de notre langue officielle. Mais reconnaissons-le, si l’on vous sort un bobard, ça mérite tout juste un ricanement, une grimace dubitative : c’est un bobard ; tandis qu’à vous balancer des fake news (des bobards), on est tout de suite plus crédible !

Bon, j’arrête là ; la prochaine fois je vous cause des poursuites galopantes sur les supposées virées litigieuses de monsieur Macron à Las Vegas – il semble que l’enquête lambine quelque peu, pour des raisons obscures – et je tartinerai une tartine sur la « violation du secret de l’instruction » : un truc grave, punissable, entrave à la justice ! mais pas vraiment, ça  dépend à quoi servent les fuites.

Tibert

Des tons détonnants qui dénotent ?

Ah ah qu’est-ce qu’ils apprennent aux écoles de journalisme ? Je lis ça dans Le Monde, à propos du constructeur de bagnoles électriques Tesla et de Ford (Tesla capitalise plus en bourse que Ford !!) :

« le constructeur de voitures électriques capitalise sur sa vision futuriste qui dénote des constructeurs historiques. »
Eh non, détonne, pas dénote. Notez bien, c’est proche, ils l’avaient dans le désordre, le quinté +, ou pas loin. Quant à détoner, c’est hélas beaucoup plus bruyant, et ça fait des dégâts.
Vous avez des doutes ? tenez, voyez http://www.academie-francaise.fr/denoter-pour-detonner
Avouez, ça repose de la Présidentielle, non ? un peu de français châtié dans ce monde impitoyable…

Tibert

PS – Au fait, L’Académie Françouaise note une nuance défavorable à « détonner » : ici ce n’est probablement pas ce qu’a voulu exprimer le journaleux. « … qui tranche…  » aurait été plus juste. Allez : « ... qui tranche favorablement« , ce serait farpait.

Du vivrensemble

Hier (j’ai perdu la référence exacte, c’était dans Le Parigot) on relatait cette déclaration confondante de Benoît « Burn-Out » Hamon : « Emmanuel Macron n’est pas de gauche« . On sait que Benoît H. se considère ni plus ni moins (*) comme the représentant de la Vraie Gauche, celle qui va bien, à gauche-à gauche, mais pas trop-trop non plus. Au point d’ailleurs de proposer à son pote et voisin de gauche, Jean-Luc M., de faire pot commun : un seul candidat et programme unique – en lui laissant le poste de chef à lui, Benoît, bien entendu ! « Faisons cause commune, range-toi derrière moi« . Gonflé, non ?

Mais bon… donc, Emmanuel M. ne serait pas, n’est pas de gauche ? et alors ? c’est épouvantable, Benoît. C’est sûr que si tout le monde était de gauche, ce serait bien plus simple, plus facile… sauf que certains le seraient un peu plus, ou un peu moins, d’où des bisbilles, des tracasseries, encore et encore. Le plus simple, Benoît, c’est la Pensée Unique, ça c’est peinard.

De ces temps où la gauche, justement, nous serine comme une rengaine le  jingle du « vivre ensemble« , eh bien, prenons-la au mot : il faut qu’elle supporte, qu’elle accepte, qu’elle  prenne comme une richesse cette diversité : qu’elle apprenne à vivre ensemble avec des gens qui ne sont pas de gauche. Ah c’est dur, c’est dur, il va falloir se faire violence.

Tibert

(*) On dit de plus en plus « juste« . Tenez, A. Juppé sur les propositions de F. Fillon : « C’est juste impossible« . C’est syntaxiquement correct, mais c’est un anglicisme. Chez nous en France ce serait plutôt « C’est carrément (simplement, tout simplement, ni plus ni moins, vraiment, hélas…) impossible« .  Ah bon, c’est impossible ?

Y a aussi des perles, dans la purée

Robert V. (*), mon vieil ami de Montpellier – décidément pugnaces, les Montpelliérains ! – me fait remonter ceci : une page entière de l’hebdo local La Gazette avec un ééénôooorme  » 0 %  » en rouge : c’est le maire actuel, dissident PS, qui se fait sa pub. « Seule ville et métropole de France, 0% d’augmentation des taux d’imposition« .

Bravo, bravo, mais il demande à voir, Robert. Il me joint les chiffres sur ses taxes (foncière + habitation) de 2014, 2015, 2016. C’est une modeste maison de ville sans terrain extérieur, avec un garage.

Pour 2014, 4.805 €   ;   2015, 5.172 €   ;  2016, 5.220 €  ; 2017 ?

On pourrait détailler, mais bon, le cumul sur 2014-2016 donne : + 8,6  %. Pas anodin ! Donc, si le maire dit vrai, vu qu’il englobe 2017 dans son cocorico, il va y avoir une forte baisse pour fin 2017, afin d’obtenir au total un montant stable (celui de 2014) sur la période. Baisse qu’il est facile de calculer : soit X le montant pour 2017… hmmmmhbmmh… allons-y Alonso…  X = (4 x 4805) – 4805 – 5172 – 5220. Donc  X =  4.023 €.  Monsieur le maire, mon ami Robert attend donc des taxes locales pour 4.023 €, pas plus. Sinon, me dit-il, ce serait, mon cher Tibert, de la pub mensongère, non ?   Ouais… ça y ressemblerait. Wait and see, comme ils disent, je vous tiendrai au courant.

Autre : Le Parigot nous sort un clip de chansons – en anglais, façon « yaourt » :  paroles à peu près totalement incompréhensibles, et bien entendu non sous-titrées, tout le monde se fout apparemment de ce que brâme le chanteur (sur le clip, il se contorsionne beaucoup, ça doit aider à libérer le diaphragme et contrôler le souffle). Ce type, un jeune et avenant Belge à casquette, est interrogé sur son dernier album… il énonce ceci : « Mon album est un appel à la tolérance« .

Ah c’était donc ça ! on a tout de suite une meilleure idée du contenu de ses textes. Parce qu’avec ses borborygmes mâchonnés en anglais-yaourt, on n’avait pas perçu clairement (**). Ou alors  cette déclaration nous inviterait à nous montrer tolérants envers sa prestation ? indulgents serait plus précis. Allez, on va faire un effort, qu’il chante en paix – pourvu qu’il croise au large.

Tibert

(*) Pour des raisons de sécurité, les noms ont été changés.

(**) Quand l’autre Belge, là, Brel, chantait « … avec Frrrida la blonnnde... »  on comprenait clairement « avec Frida la blonde » ; ou bien Adamo : « … mmmais tombeuh la neigeuh… » : la neige tombe, d’accord. Mais les textes,  bof, les textes…